Je suis plus heureux que vous ne sauriez croire, mes bons amis, de vous trouver réunis. Je suis au milieu de vous, dans une atmosphère sympathique et bienveillante qui satisfait à la fois mon esprit et mon cœur.
Depuis longtemps, j’eusse vivement désiré voir des relations régulières s’établir entre l’école française et l’école américaine. Pour nous entendre, mon Dieu, il faudrait simplement nous voir et nous communiquer nos opinions. J’ai toujours considéré votre salon, chère demoiselle, comme un pont jeté entre l’Europe et l’Amérique, entre la France et l’Angleterre, et qui contribuerait puissamment à supprimer les divergences qui nous séparent et à établir en un mot, un courant d’idées communes d’où surgiraient, dans l’avenir, la fusion et l’unité.
Cher monsieur Peebles, n permettez-moi de vous féliciter de votre vif désir d’entrer en relation avec nous. Nous ne devons pas nous souvenir si nous sommes des spirites ou des spiritualistes. Nous serons les uns pour les autres, des hommes, des Esprits qui cherchent consciencieusement la vérité et qui l’accueilleront avec reconnaissance, qu’elle résulte des études françaises ou des études américaines.
Les Esprits de l’espace conservent leurs sympathies et leurs habitudes terrestres. Les Esprits des Américains morts sont encore des Américains, comme les désincarnés qui ont vécu en France sont encore Français dans l’espace. De là, la différence des enseignements dans certains centres. Chaque groupe d’Esprits, par sa nature même, par esprit national, approprie ses instructions au caractère, au génie spécial de ceux à qui il parle. Mais de même que, sur terre, les barrières qui séparent les nationalités tendent à disparaître, de même, dans l’espace, les caractères distinctifs s’effacent, les nuances se confondent et, dans un temps à venir, moins éloigné que vous ne le supposez, il n’y aura plus sur terre comme dans l’espace, ni Français, ni Anglais, ni Américains, mais des hommes et des Esprits, fils de Dieu au même titre, et aspirant par toutes leurs facultés, au progrès et à la régénération universelle.
Messieurs, je salue ce soir, dans cette réunion, l’aurore d’une fusion prochaine entre les diverses écoles spirites, et je me félicite de compter M. Peebles, au nombre des hommes sans préventions, dont le concours et la bonne volonté assureront la vitalité de nos enseignements dans l’avenir et leur universelle vulgarisation.
Traduisez mes ouvrages ! On ne connaît en Amérique que les arguments contre la réincarnation ; lorsque les démonstrations en faveur de ce principe y seront populaires, le Spiritisme et le Spiritualisme ne tarderont pas à se confondre et deviendront par leur fusion, la philosophie naturelle adoptée par tous.
Allan Kardec.
[1] ERRATUM. – Revue spirite de novembre 1869, page 337, ligne 2, au lieu de Paris, 14 septembre, lisez : Paris, 4 octobre.
[2] [v.
Voyage
de M. Peebles en Europe.]