OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES. — SUPÉRIORITÉ DE LA NATURE DE
JÉSUS : (1, 2.)
— Songes. (3.) —
Étoile des mages. (4.)
— DOUBLE VUE : Entrée de Jésus à Jérusalem. (5.)
— Baiser de Judas. (6.)
— Pêche milaculeuse. (7.)
— Vocation de Pierre, André, Jacques, Jean et Matthieu. (8,
9.) — GUÉRISONS : Perte
de sang. (10, 11.)
— Aveugle de Bethsaïde. (12,
13.) — Paralytique. (14,
15.) — Les dix lépreux. (16,
17.) — Main séche. (18.)
— La femme courbée. (19,
20.) — Paralytique de la piscine. (21-23.)
— Aveugle-né. (24, 25.)
— Nombreuses guérisons de Jésus. (26-28.)
— POSSÉDÉS. (29-36.)
— RÉSURRECTIONS : Fille de Jaïre. (37.)
— Fils de la veuve de Naïm. (38-40.)
— AUTRES : Jésus marche sur l’eau. (41,
42.) — Transfiguration. (43,
44.) — Tempête apaisée. (45,
46.) — Noces de Cana. (47.)
— Multiplication des pains. (48.)
— Le levain de pharisiens. (49.)
— Le pain du Ciel. (50,
51.) — Tentation de Jésus. (52,
53.) — Prodiges à la mort de Jésus. (54,
55.) — Apparition de Jésus après sa mort. (56-63.)
— Disparition du corps de Jésus. (64-67.) |
Perte de sang.
10. — Alors une femme, malade d’une perte de sang depuis douze ans, — qui avait beaucoup souffert entre les mains de plusieurs médecins, et qui, ayant dépensé tout son bien, n’en avait reçu aucun soulagement, mais s’en était toujours trouvée plus mal, — ayant entendu parler de Jésus, vint dans la foule par-derrière, et toucha son vêtement ; car elle disait : Si je puis seulement toucher son vêtement, je serai guérie. — Au même instant la source du sang qu’elle perdait fut séchée, et elle sentit dans son corps qu’elle était guérie de cette maladie.
Aussitôt Jésus, connaissant en lui-même la vertu qui était sortie de lui, se retourna au milieu de la foule, et dit : Qui est-ce qui a touché mes vêtements ? — Ses disciples lui dirent : Vous voyez que la foule vous presse de tous côtés, et vous demandez qui vous a touché ? — Et il regardait tout autour de lui pour voir celle qui l’avait touché.
Mais cette femme, qui savait ce qui s’était passé en elle, étant saisie
de crainte et de frayeur, vint se jeter à ses pieds, et lui déclara
toute la vérité. — Et Jésus lui dit : Ma fille, votre foi vous
a sauvée ; allez en paix, et soyez guérie de votre maladie. (Saint
Marc, ch. V, v. de 25 à 34.)
11. — Ces paroles : « Connaissant en lui-même la vertu qui était sortie de lui », sont significatives ; elles expriment le mouvement fluidique qui s’opérait de Jésus à la femme malade ; tous les deux ont ressenti l’action qui venait de se produire. 2 Il est remarquable que l’effet n’a été provoqué par aucun acte de la volonté de Jésus ; il n’y a eu ni magnétisation, ni imposition des mains. Le rayonnement fluidique normal a suffi pour opérer la guérison.
3 Mais pourquoi ce rayonnement s’est-il dirigé vers cette femme plutôt que vers d’autres, puisque Jésus ne pensait pas à elle, et qu’il était entouré par la foule ?
4 La raison en est bien simple. Le fluide, étant donné comme matière thérapeutique, doit atteindre le désordre organique pour le réparer ; il peut être dirigé sur le mal par la volonté du guérisseur, ou attiré par le désir ardent, la confiance, en un mot la foi du malade. 5 Par rapport au courant fluidique, le premier fait l’effet d’une pompe foulante et le second d’une pompe aspirante. 6 Quelquefois la simultanéité des deux effets est nécessaire, d’autres fois un seul suffit ; c’est le second qui a eu lieu en cette circonstance.
7
Jésus avait donc raison de dire : « Votre foi vous a sauvée. »
8
On comprend qu’ici la foi n’est pas la vertu mystique telle que certaines
personnes l’entendent, mais une véritable force attractive, tandis
que celui qui ne l’a pas oppose au courant fluidique une force répulsive,
ou tout au moins une force d’inertie qui paralyse l’action. 9
D’après cela, on comprend que de deux malades atteints du même mal,
étant en présence d’un guérisseur, l’un puisse être guéri, et l’autre
non. 10 C’est là
un des principes les plus importants de la médiumnité guérissante et
qui explique, par une cause très naturelle, certaines anomalies apparentes.
(Chap. XIV, nº 31,
32, 33.)
12. — Etant arrivé à Bethsaïde, on lui amena un aveugle qu’on le pria de toucher.
Et prenant l’aveugle par la main, il le mena hors du bourg ; il lui mit de la salive sur les yeux, et lui ayant imposé les mains, il lui demanda s’il voyait quelque chose. — Cet homme, regardant, lui dit : Je vois marcher des hommes qui me paraissent comme des arbres. — Jésus lui mit encore une fois les mains sur les yeux, et il commença à mieux voir ; et enfin il fut tellement guéri, qu’il voyait distinctement toutes choses.
Il le renvoya ensuite dans sa maison, et lui dit : Allez-vous-en
en votre maison ; et si vous entrez dans le bourg, n’y dites à
personne ce qui vous est arrivé. (Saint
Marc, ch. VIII, v. de 22 à 26.)
13. — Ici l’effet magnétique est évident ; la guérison n’a pas été instantanée, mais graduelle et par suite d’une action soutenue et réitérée, quoique plus rapide que dans la magnétisation ordinaire. La première sensation de cet homme est bien celle qu’éprouvent les aveugles en recouvrant la lumière ; par un effet d’optique les objets leur paraissent d’une grandeur démesurée.
14. — Jésus, étant monté dans une barque, repassa le lac et vint dans sa ville (Capharnaüm). — Et comme on lui eut présenté un paralytique couché sur un lit, Jésus, voyant leur foi, dit à ce paralytique : Mon fils, ayez confiance, vos péchés vous sont remis.
Aussitôt quelques-uns des scribes dirent en eux-mêmes : Cet homme blasphème. — Mais Jésus, ayant connu ce qu’ils pensaient, leur dit : Pourquoi avez-vous de mauvaises pensées dans vos cœurs ? — Car, lequel est le plus aisé, ou de dire : Vos péchés vous sont remis, ou de dire : Levez-vous et marchez ? — Or, afin que vous sachiez que le Fils de l’homme a sur la terre le pouvoir de remettre les péchés : Levez-vous, dit-il alors au paralytique ; emportez votre lit, et allez-vous-en dans votre maison.
Le paralytique se leva aussitôt et s’en alla en sa maison. — Et le
peuple, voyant ce miracle, fut rempli de crainte et rendit gloire à
Dieu de ce qu’il avait donné une telle puissance aux hommes. (Saint
Matth., ch. IX, v. de 1 à 8.)
15. — Que pouvaient signifier ces paroles : « Vos péchés vous sont remis, » et à quoi pouvaient-elles servir pour la guérison ? 2 Le Spiritisme en donne la clef, comme d’une infinité d’autres paroles incomprises jusqu’à ce jour ; il nous apprend, par la loi de la pluralité des existences, que les maux et les afflictions de la vie sont souvent des expiations du passé, et que nous subissons dans la vie présente les conséquences des fautes que nous avons commises dans une existence antérieure : les différentes existences étant solidaires les unes des autres, jusqu’à ce qu’on ait payé la dette de ses imperfections.
3 Si donc la maladie de cet homme était une punition pour le mal qu’il avait pu commettre, en lui disant : « Vos péchés vous sont remis, » c’était lui dire : « Vous avez payé votre dette ; la cause de votre maladie est effacée par votre foi présente ; en conséquence, vous méritez d’être délivré de votre maladie. » 4 C’est pour cela qu’il dit aux scribes : « Il est aussi facile de dire : Vos péchés vous sont remis, que : Levez-vous et marchez ; » la cause cessant, l’effet doit cesser. 5 Le cas est le même que pour un prisonnier à qui l’on viendra dire : « Votre crime est expié et pardonné, » ce qui équivaudrait à lui dire : « Vous pouvez sortir de prison ».
16. — Un jour qu’il allait à Jérusalem, et passait par les confins de la Samarie et de la Galilée, — étant près d’entrer dans un village, dix lépreux vinrent au-devant de lui ; et se tenant éloignés, ils élevèrent leurs voix et lui dirent : Jésus, notre maître, ayez pitié de nous. — Lorsqu’il les eut aperçus, il leur dit : Allez vous montrer aux prêtres. Et comme ils y allaient, ils furent guéris.
L’un deux, voyant qu’il était guéri, retourna sur ses pas, glorifiant Dieu à haute voix ; — et vint se jeter aux pieds de Jésus, le visage contre terre, en lui rendant grâces ; et celui-là était Samaritain.
Alors Jésus dit : Tous les dix n’ont-ils pas été guéris ?
Où sont donc les neuf autres ? — Il ne s’en est point trouvé qui
soit revenu, et qui ait rendu gloire à Dieu, sinon cet étranger. — Et
il lui dit : Levez-vous, allez ; votre foi vous a sauvé. (Saint
Luc, ch. XVII, v. de 11 à 19.)
17. — Les Samaritains étaient des schismatiques, comme à peu près les protestants à l’égard des catholiques, et méprisés par les Juifs comme des hérétiques. 2 Jésus, en guérissant indistinctement les Samaritains et les Juifs, donnait à la fois une leçon et un exemple de tolérance ; et, en faisant ressortir que le Samaritain seul était revenu rendre gloire à Dieu, il montrait qu’il y avait en lui plus de vraie foi et de reconnaissance que chez ceux qui se disaient orthodoxes. 3 En ajoutant : « Votre foi vous a sauvé », il fait voir que Dieu regarde le fond du cœur et non la forme extérieure de l’adoration. 4 Cependant les autres ont été guéris ; il le fallait pour la leçon qu’il voulait donner, et prouver leur ingratitude ; mais qui sait ce qu’il en sera résulté, et s’ils auront bénéficié de la faveur qui leur avait été accordée ? 5 En disant au Samaritain : « Votre foi vous a sauvé », Jésus donne à entendre qu’il n’en sera pas de même des autres.
18. — Jésus entra une autre fois dans la synagogue, où il trouva un homme qui avait une main sèche. — Et ils l’observaient pour voir s’il le guérirait un jour de sabbat afin d’en prendre sujet de l’accuser. — Alors, il dit à cet homme qui avait une main sèche : Levez-vous, tenez-vous là au milieu. — Puis il leur dit : Est-il permis au jour du sabbat de faire du bien ou du mal, de sauver la vie ou de l’ôter ? Et ils demeurèrent dans le silence. — Mais lui, les regardant avec colère, affligé qu’il était de l’aveuglement de leur cœur, dit à cet homme : Etendez votre main. Il l’étendit, et elle devint saine.
Aussitôt les pharisiens, étant sortis, tinrent conseil contre lui avec
les hérodiens, sur le moyen de le perdre. — Mais Jésus se retira avec
ses disciples vers la mer, où une grande multitude de peuple le suivit
de Galilée et de Judée, — de Jérusalem, de l’Idumée, et d’au-delà le
Jourdain ; et ceux des environs de Tyr et de Sidon, ayant entendu
parler des choses qu’il faisait, vinrent en grand nombre le trouver.
(Saint
Marc, ch. III, v. de 1 à 8.)
19. — Jésus enseignait dans une synagogue tous les jours de sabbat. — Et un jour, il y vit une femme possédée d’un Esprit qui la rendait malade depuis dix-huit ans ; et elle était si courbée, qu’elle ne pouvait du tout regarder en haut. — Jésus la voyant, l’appela et lui dit : Femme, vous êtes délivrée de votre infirmité. — En même temps, il lui imposa les mains ; et étant aussitôt redressée, elle en rendit gloire à Dieu.
Mais le chef de la synagogue, indigné de ce que Jésus l’avait guérie un jour de sabbat, dit au peuple : Il y a six jours destinés pour travailler ; venez ces jours-là pour être guéris et non aux jours du sabbat.
Le Seigneur, prenant la parole, lui dit : Hypocrite, y a-t-il quelqu’un de vous qui ne délie pas son boeuf ou son âne de la crèche le jour du sabbat, et ne le mène boire ? — Pourquoi donc ne fallait-il pas délivrer de ses liens, en un jour de sabbat, cette fille d’Abraham que Satan avait tenue ainsi liée durant dix-huit ans ?
A ces paroles, tous ses adversaires demeurèrent confus, et tout le
peuple était ravi de lui voir faire tant d’actions glorieuses. (Saint
Luc, ch. XIII, v. de 10 à 17.)
20. — Ce fait prouve qu’à cette époque la plupart des maladies étaient attribuées au démon, et que l’on confondait, comme aujourd’hui, les possédés avec les malades, mais en sens inverse ; c’est-à-dire qu’aujourd’hui, ceux qui ne croient pas aux mauvais Esprits confondent les obsessions avec les maladies pathologiques.
21. — Après cela, la fête des Juifs étant arrivée, Jésus s’en alla à Jérusalem. — Or, il y avait à Jérusalem la piscine des Brebis, qui s’appelle en hébreu : Bethsaïda, qui avait cinq galeries, — dans lesquelles étaient couchés un grand nombre de malades, d’aveugles, de boiteux, et de ceux qui avaient les membres desséchés, qui tous attendaient que l’eau fût remuée. — Car l’ange du Seigneur, en un certain temps, descendait dans cette piscine, et en remuait l’eau ; et celui qui entrait le premier, après que l’eau avait été ainsi remuée, était guéri, quelque maladie qu’il eût.
Or, il y avait là un homme qui était malade depuis trente-huit ans. — Jésus l’ayant vu couché, et connaissant qu’il était malade depuis fort longtemps, lui dit : Voulez-vous être guéri ? — Le malade répondit : Seigneur, je n’ai personne pour me jeter dans la piscine après que l’eau a été remuée ; et, pendant le temps que je mets à y aller, un autre y descend avant moi. — Jésus lui dit : Levez-vous, emportez votre lit et marchez. — A l’instant cet homme fut guéri ; et prenant son lit, il commença à marcher. Or, ce jour-là était un jour de sabbat.
Les Juifs dirent donc à celui qui avait été guéri : C’est aujourd’hui le sabbat ; il ne vous est pas permis d’emporter votre lit. — Il leur répondit : Celui qui m’a guéri m’a dit : Emportez votre lit et marchez. — Ils lui demandèrent : Qui donc est cet homme qui vous a dit : Emportez votre lit et marchez ? — Mais celui qui avait été guéri ne savait pas lui-même qui il était, car Jésus s’était retiré de la foule du peuple qui était là.
Depuis, Jésus trouva cet homme dans le Temple, et lui dit : Vous voyez que vous êtes guéri, ne péchez plus à l’avenir, de peur qu’il ne vous arrive quelque chose de pis.
Cet homme s’en alla trouver les Juifs, et leur dit que c’était Jésus
qui l’avait guéri. — Et c’est pour cette raison que les Juifs persécutaient
Jésus, parce qu’il faisait ces choses-là le jour du sabbat. — Alors
Jésus leur dit : Mon Père ne cesse point d’agir jusqu’à présent,
et j’agis aussi incessamment. (Saint
Jean, ch. V, v. de 1 à 17.)
22. — Piscine (du mot latin piscis, poisson) se disait, chez les Romains, des réservoirs ou viviers où l’on nourrissait des poissons. Plus tard, l’acception de ce mot fut étendue aux bassins où l’on se baignait en commun.
2 La piscine de Bethsaïda, à Jérusalem, était une citerne, près du Temple, alimentée par une source naturelle, dont l’eau paraît avoir eu des propriétés curatives. C’était sans doute une source intermittente, qui, à certaines époques, jaillissait avec force et remuait l’eau. Selon la croyance vulgaire, ce moment était le plus favorable aux guérisons ; peut-être qu’en réalité, au moment de sa sortie, l’eau avait une propriété plus active, ou que l’agitation produite par l’eau jaillissante remuait la vase salutaire dans certaines maladies. 3 Ces effets sont très naturels et parfaitement connus aujourd’hui ; mais alors les sciences étaient peu avancées, et l’on voyait une cause surnaturelle dans la plupart des phénomènes incompris. 4 Les Juifs attribuaient donc l’agitation de cette eau à la présence d’un ange, et cette croyance leur semblait d’autant mieux fondée, qu’à ce moment l’eau était plus salutaire.
5 Après avoir guéri cet homme, Jésus lui dit : « A l’avenir ne péchez plus, de peur qu’il ne vous arrive quelque chose de pis. » 6 Par ces paroles, il lui fait entendre que sa maladie était une punition, et que, s’il ne s’améliore pas, il pourra être de nouveau puni encore plus rigoureusement. Cette doctrine est entièrement conforme à celle qu’enseigne le Spiritisme.
23. — Jésus semblait prendre à tâche d’opérer ses guérisons le jour du sabbat, pour avoir occasion de protester contre le rigorisme des pharisiens touchant l’observation de ce jour. 2 Il voulait leur montrer que la vraie piété ne consiste pas dans l’observance des pratiques extérieures et des choses de forme, mais qu’elle est dans les sentiments du cœur. 3 Il se justifie en disant : « Mon Père ne cesse point d’agir jusqu’à présent, et j’agis aussi incessamment ; » c’est-à-dire Dieu ne suspend point ses œuvres ni son action sur les choses de la nature le jour du sabbat ; il continue à faire produire ce qui est nécessaire à votre nourriture et à votre santé, et je suis son exemple.
24. — Lorsque Jésus passait, il vit un homme qui était aveugle dès sa naissance ; — et ses disciples lui firent cette demande : Maître, est-ce le péché de cet homme, ou le péché de ceux qui l’ont mis au monde, qui est cause qu’il est né aveugle ?
Jésus leur répondit : Ce n’est point qu’il a péché, ni ceux qui l’ont mis au monde ; mais c’est afin que les œuvres de la puissance de Dieu éclatent en lui. Il faut que je fasse les œuvres de celui qui m’a envoyé pendant qu’il est jour ; la nuit vient, dans laquelle personne ne peut agir. — Tant que je suis dans le monde, je suis la lumière du monde.
Après avoir dit cela, il cracha à terre, et ayant fait de la boue avec sa salive, il oignit de cette boue les yeux de l’aveugle, — et lui dit : Allez vous laver dans la piscine de Siloé qui signifie Envoyé. Il y alla donc, il s’y lava, et en revint voyant clair.
Ses voisins et ceux qui l’avaient vu auparavant demander l’aumône, disaient : N’est-ce pas celui qui était assis, et qui demandait l’aumône ? Les uns répondaient : C’est lui ; — d’autres disaient : Non, c’est un qui lui ressemble. Mais il leur disait : C’est moi-même. — Ils lui dirent donc : Comment vos yeux se sont-ils ouverts ? — Il leur répondit : Cet homme qu’on appelle Jésus a fait de la boue et en a oint mes yeux, et m’a dit : Allez à la piscine de Siloé et vous y lavez. J’y ai été, je m’y suis lavé, et je vois. — Ils lui dirent : Où est-il ? Il leur répondit : Je ne sais.
Alors ils amenèrent aux pharisiens cet homme qui avait été aveugle. — Or, c’était le jour du sabbat que Jésus avait fait cette boue et lui avait ouvert les yeux.
Les pharisiens l’interrogèrent donc aussi eux-mêmes pour savoir comment il avait recouvré la vue. Et il leur dit : Il m’a mis de la boue sur les yeux ; je me suis lavé et je vois. — Sur quoi quelques-uns des pharisiens dirent : Cet homme n’est point envoyé de Dieu, puisqu’il ne garde point le sabbat. Mais d’autres disaient : Comment un méchant homme pourrait-il faire de tels prodiges ? Et il y avait sur cela de la division entre eux.
Ils dirent donc de nouveau à l’aveugle : Et toi, que dis-tu de cet homme qui t’a ouvert les yeux ? Il répondit : Je dis que c’est un prophète. — Mais les Juifs ne crurent point que cet homme eût été aveugle, et qu’il eût recouvré la vue, jusqu’à ce qu’ils eussent fait venir son père et sa mère, — qu’ils interrogèrent, en leur disant : Est-ce là votre fils que vous dites être né aveugle ? Comment donc voit-il maintenant ? Le père et la mère répondirent : — Nous savons que c’est là notre fils, et qu’il est né aveugle ; — mais nous ne savons comment il voit maintenant, et nous ne savons pas non plus qui lui a ouvert les yeux. Interrogez-le ; il a de l’âge, qu’il réponde pour lui-même.
Son père et sa mère parlaient de la sorte, parce qu’ils craignaient les Juifs ; car les Juifs avaient déjà résolu ensemble que quiconque reconnaîtrait Jésus pour être le Christ, serait chassé de la synagogue. — Ce fut ce qui obligea le père et la mère de répondre : Il a de l’âge, interrogez-le lui-même.
Ils appelèrent donc une seconde fois cet homme qui avait été aveugle, et lui dirent : Rends gloire à Dieu ; nous savons que cet homme est un pécheur. — Il leur répondit : Si c’est un pécheur, je n’en sais rien ; mais tout ce que je sais, c’est que j’étais aveugle, et je vois maintenant. — Ils lui dirent encore : Que t’a-t-il fait, et comment t’a-t-il ouvert les yeux ? — Il leur répondit : Je vous l’ai déjà dit, et vous l’avez entendu ; pourquoi voulez-vous l’entendre encore une fois ? Est-ce que vous voulez devenir ses disciples ? — Sur quoi, ils le chargèrent d’injures, et lui dirent : Sois toi-même son disciple ; pour nous, nous sommes les disciples de Moïse. — Nous savons que Dieu a parlé à Moïse, mais pour celui-ci nous ne savons d’où il sort.
Cet homme leur répondit : C’est ce qui est étonnant que vous ne sachiez pas d’où il est, et qu’il m’ait ouvert les yeux. — Or, nous savons que Dieu n’exauce point les pécheurs ; mais si quelqu’un l’honore et qu’il fasse sa volonté, c’est celui-là qu’il exauce. — Depuis que le monde est, on n’a jamais entendu dire que personne ait ouvert les yeux à un aveugle-né. — Si cet homme n’était point envoyé de Dieu, il ne pourrait rien faire de tout ce qu’il a fait.
Ils lui répondirent : Tu n’es que péché dès le ventre de ta mère,
et tu veux nous enseigner ? Et ils le chassèrent. (Saint
Jean, ch. IX, v. de 1 à 34.)
25. — Ce récit, si simple et si naïf, porte en soi un caractère évident de vérité. 2 Rien de fantastique ni de merveilleux ; c’est une scène de la vie réelle prise sur le fait. 3 Le langage de cet aveugle est bien celui de ces hommes simples chez lesquels le savoir est suppléé par le bon sens, et qui rétorquent les arguments de leurs adversaires avec bonhomie, et par des raisons qui ne manquent ni de justesse, ni d’à-propos. 4 Le ton des pharisiens n’est-il pas celui de ces orgueilleux qui n’admettent rien au-dessus de leur intelligence, et s’indignent à la seule pensée qu’un homme du peuple puisse leur en remontrer ? 5 Sauf la couleur locale des noms, on se croirait de notre temps.
6 Être chassé de la synagogue équivalait à être mis hors de l’Église ; c’était une sorte d’excommunication. 7 Les Spirites, dont la doctrine est celle du Christ interprétée selon le progrès des lumières actuelles, sont traités comme les Juifs qui reconnaissaient Jésus pour le Messie ; en les excommuniant, on les met hors de l’Église, comme firent les scribes et les pharisiens à l’égard des partisans de Jésus. 8 Ainsi, voici un homme qui est chassé, parce qu’il ne peut croire que celui qui l’a guéri soit un possédé du démon, et parce qu’il glorifie Dieu de sa guérison ! 9 N’est-ce pas ce que l’on fait à l’égard des spirites ? 10 Ce qu’ils obtiennent : sages conseils des Esprits, retour à Dieu et au bien, guérisons, tout est l’œuvre du diable et on leur jette l’anathème. 11 N’a-t-on pas vu des prêtres dire, du haut de la chaire, qu’il valait mieux rester incrédule que de revenir à la foi par le Spiritisme ? 12 N’en a-t-on pas vu dire à des malades qu’ils ne devaient se faire guérir par les Spirites qui possèdent ce don, parce que c’est un don satanique ? 13 D’autres prêcher que les malheureux ne devaient pas accepter le pain distribué par les Spirites, parce que c’était le pain du diable ? 14 Que disaient et que faisaient de plus les prêtres juifs et les pharisiens ? Du reste, il est dit que tout doit se passer aujourd’hui comme au temps du Christ.
15 Cette demande des disciples : Est-ce le péché de cet homme qui est cause qu’il est né aveugle ? indique l’intuition d’une existence antérieure, autrement elle n’aurait pas de sens ; car le péché qui serait la cause d’une infirmité de naissance devrait avoir été commis après la naissance et, par conséquent, dans une existence antérieure. 16 Si Jésus avait vu là une idée fausse, il leur aurait dit : « Comment cet homme aurait-il pu pécher avant d’être né ? » 17 Au lieu de cela, il leur dit que cet homme est aveugle, ce n’est pas qu’il ait péché, mais afin que la puissance de Dieu éclate en lui, c’est-à-dire qu’il devait être l’instrument d’une manifestation de la puissance de Dieu. 18 Si ce n’était pas une expiation du passé, c’était une épreuve qui devait servir à son avancement, car Dieu, qui est juste, ne pouvait lui imposer une souffrance sans compensation.
19 Quant au moyen employé pour le guérir, il est évident que l’espèce de boue faite avec de la salive et de la terre ne pouvait avoir de vertu que par l’action du fluide guérisseur dont elle était imprégnée ; 20 c’est ainsi que les substances les plus insignifiantes : l’eau, par exemple, peuvent acquérir des qualités puissantes et effectives sous l’action du fluide spirituel ou magnétique auquel elles servent de véhicule, ou, si l’on veut, de réservoir.
26. — Jésus allait par toute la Galilée, enseignant dans les synagogues,
prêchant l’Évangile du royaume, et guérissant toutes les langueurs et
toutes les maladies parmi le peuple. — Et sa réputation s’étant répandue
par toute la Syrie, ils lui présentaient tous ceux qui étaient malades,
et diversement affligés de maux et de douleurs, les possédés, les lunatiques,
les paralytiques, et il les guérissait ; — et une grande multitude
de peuple le suivit de la Galilée, de la Décapole, de Jérusalem, de
la Judée, et d’au-delà du Jourdain. (Saint
Matth., ch. IV, v. 23, 24, 25.)
27. — De tous les faits qui témoignent de la puissance de Jésus, les plus nombreux sont, sans contredit, les guérisons ; 2 il voulait prouver par là que la vraie puissance est celle qui fait le bien,
3 que son but était de se rendre utile, et non de satisfaire la curiosité des indifférents par des choses extraordinaires.
4 En soulageant la souffrance, il s’attachait les gens par le cœur, et se faisait des prosélytes plus nombreux et plus sincères que s’ils n’eussent été frappés que par le spectacle des yeux. 5 Par ce moyen il se faisait aimer, tandis que, s’il se fût borné à produire des effets matériels surprenants, comme en demandaient les pharisiens, la plupart n’auraient vu en lui qu’un sorcier et un habile jongleur que les désoeuvrés, eussent été voir pour se distraire.
6 Ainsi, quand Jean-Baptiste envoie à lui ses disciples pour lui demander s’il est le Christ, il ne dit pas : « Je le suis, » car tout imposteur aurait pu en dire autant ;7 il ne leur parle ni de prodiges, ni de choses merveilleuses, mais il leur répond simplement : « Allez dire à Jean : Les aveugles voient, les malades sont guéris, les sourds entendent, l’Évangile est annoncé aux pauvres. »8 C’était lui dire : « Reconnaissez-moi à mes œuvres, jugez l’arbre à son fruit, » car là est le véritable caractère de sa mission divine.
28. — C’est aussi par le bien qu’il fait que le Spiritisme prouve sa mission providentielle. 2 Il guérit les maux physiques, mais il guérit surtout les maladies morales, et ce sont là les plus grands prodiges par lesquels il s’affirme. 3 Ses plus sincères adeptes ne sont pas ceux qui n’ont été frappés que par la vue des phénomènes extraordinaires, mais ceux qui ont été touchés au cœur par la consolation : 4 ceux qui ont été délivrés des tortures du doute ; 5 ceux dont le courage a été relevé dans les afflictions, qui ont puisé la force dans la certitude de l’avenir qu’il est venu leur apporter, dans la connaissance de leur être spirituel et de sa destinée. 6 Voilà ceux dont la foi est inébranlable, parce qu’ils sentent et comprennent.
7 Ceux qui ne voient dans le Spiritisme que des effets matériels ne peuvent comprendre sa puissance morale ; 8 aussi les incrédules, qui ne le connaissent que par des phénomènes dont ils n’admettent pas la cause première, ne voient dans les Spirites que des jongleurs et des charlatans. 9 Ce n’est donc pas par des prodiges que le Spiritisme triomphera de l’incrédulité : c’est en multipliant ses bienfaits moraux, 10 car si les incrédules n’admettent pas les prodiges, ils connaissent, comme tout le monde, la souffrance et les afflictions, et personne ne refuse les soulagements et les consolations.
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- Recherche de livres (Première
édition - 1868) et (Cinquième
édition - 1872.)