Le Chemin Écriture du Spiritisme Chrétien.
Doctrine spirite - 1re partie. ©

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Revue spirite — Année X — Août 1867.

(Langue portugaise)

SIMONET.

Médium guérisseur de Bordeaux.  † 

1. — Le Figaro du 5 juillet dernier rendait compte en ces termes d’un jugement rendu par le tribunal de Bordeaux :


« Dans ces derniers temps, la fureur à Bordeaux était d’aller consulter le sorcier de Cauderan.  †  On évalue à mille ou douze cents le nombre des visites qu’il recevait chaque jour. La police, qui fait profession de scepticisme, s’est émue d’un pareil succès, et elle a voulu opérer une descente au château de Bel-Air  †  où le sorcier avait élu domicile. Aux alentours de la demeure du sorcier on rencontrait une foule de gens se disant atteints de toute espèce de maladies ; des grandes dames y venaient aussi en calèche pour consulter l’illuminé.

« Les magistrats, dès qu’ils eurent interrogé le sorcier, ne doutèrent pas qu’ils n’eussent affaire à un pauvre fou qui était exploité par ceux mêmes qui lui donnaient l’hospitalité ; aussi, le sorcier Simonet n’a-t-il pas été compris dans la poursuite qu’on s’est contenté de diriger contre les frères Barbier, adroits compères qui recueillaient tous les profits de la crédulité gasconne.

« Leur maison, qu’en vrais Gascons qu’ils sont ils décoraient du nom de château, avait été convertie en auberge ; seulement, les vins qu’ils y débitaient n’avaient rien de commun avec ce qu’on appelle en Languedoc  †  des vins de Château ; et puis ils avaient oublié de se pourvoir d’une licence, si bien que l’administration des contributions indirectes leur faisait un procès.

« Le sorcier Simonet était cité comme témoin.

– « Où avez-vous appris la médecine, vous qui étiez un simple chaudronnier ?

– « Et que pensez-vous de la révélation ? Qu’étaient donc les disciples du Christ ? Que faisaient-ils, ces pauvres pêcheurs qui ont converti le monde ? Dieu m’est apparu ; il m’a donné sa science, je n’ai même pas besoin des remèdes, je suis un médecin guérisseur.

– « Où avez-vous appris tout cela ?

– « Dans Allan Kardec… et même, Monsieur le président, je vous le dis avec tout le respect possible, vous ne paraissez pas connaître la science du Spiritisme et je vous engage très fort à l’étudier. (Hilarité à laquelle ne résistent pas les juges eux-mêmes.)

– « Vous abusez de la crédulité publique. Ainsi, pour ne citer qu’un exemple, il y a un pauvre aveugle que tout Bordeaux connaît. Il a eu la faiblesse d’aller chez vous, et il vous portait les oboles qu’il recevait de la charité publique. Lui avez-vous rendu la vue ?

– « Je ne guéris pas tout le monde, mais il faut croire que je fais des cures, puisque le jour où la justice est venue, il y avait plus de 1,500 personnes qui attendaient leur tour.

– « C’est malheureusement vrai.

« M. le procureur impérial. – Et si cela continue, nous prendrons une de ces deux mesures : ou nous vous traduirons ici pour escroquerie, et la justice appréciera si vous êtes fou, ou nous ferons prendre une mesure administrative contre vous. Il faut protéger les honnêtes gens contre leur incrédulité.

« Au château de Bel-Air on ne demandait pas d’argent aux consultants ; on leur distribuait seulement un numéro d’ordre, qu’on faisait payer vingt centimes ; puis il y en avait qui trafiquaient de ces numéros, les revendant jusqu’à quinze francs. Enfin, on donnait à manger aux pauvres paysans venus quelquefois des extrémités du département. Enfin, il y avait un tronc pour les pauvres ; il n’est pas besoin de dire que les hôtes du sorcier s’appliquaient l’argent des pauvres.

« Le tribunal a condamné les sieurs Barbier en deux mois et un mois de prison et 300 fr. envers les contributions indirectes.

« Ad. ROCHER. »


2. — Voici la vérité sur Simonet, et de quelle manière sa faculté s’est révélée.

Les sieurs Barbier font construire à Cauderan,  †  faubourg de Bordeaux,  †  un vaste établissement, comme il y en a plusieurs dans le quartier, destiné à des bals, noces et repas de corps, et auquel ils ont donné le nom de Château du Bel-Air, ce qui n’est pas plus gascon que le Château-Rouge ou le Château des Fleurs de Paris. Simonet y travaillait comme menuisier et non chaudronnier. Pendant les travaux de construction, il arrivait assez souvent que des ouvriers étaient blessés ou malades ; Simonet, Spirite depuis longtemps, et connaissant un peu le magnétisme, fut porté instinctivement et sans dessein prémédité à les soigner par l’influence fluidique, et il en guérit beaucoup. Le bruit de ces guérisons se répandit, et bientôt il vit une foule de malades accourir à lui, tant il est vrai que, quoi que l’on fasse, on n’ôtera pas aux malades l’envie d’être guéris, n’importe par qui. Nous tenons de témoins oculaires que la moyenne de ceux qui se présentaient était de plus de mille par jour. La route était encombrée de voitures de toutes sortes venant de plusieurs lieues à la ronde, de charrettes à côté des équipages. Il y avait des gens qui passaient la nuit pour attendre leur tour.

Mais dans cette foule, il se trouvait des gens qui avaient besoin de boire et de manger ; les entrepreneurs de l’établissement y pourvurent, et cela devint pour eux une très bonne affaire. Quant à Simonet, qui était une source de profits indirects, il était logé et nourri, c’était bien le moins, et on ne saurait lui en faire un reproche. Comme on se bousculait à la porte, pour éviter la confusion, on prit le sage parti de donner un numéro d’ordre aux arrivants ; mais on eut l’idée moins heureuse de faire payer ce numéro dix centimes, et plus tard vingt centimes ; ce qui, vu l’affluence, faisait par jour une somme assez ronde.

Quelque minime que fût cette rétribution, tous les Spirites, et Simonet lui-même qui n’y était pour rien, la virent avec peine, pressentant le mauvais effet que cela produirait. Quant au trafic des billets, il paraît certain que quelques personnes plus pressées, pour passer plus tôt, ont acheté la place de pauvres gens qui étaient avant eux, très contents de cette aubaine ; à cela il n’y a pas grand mal, mais il pouvait et devait nécessairement en résulter des abus. Ce sont ces abus qui ont motivé l’instance judiciaire, dirigée contre les sieurs Barbier, comme ayant ouvert un établissement de consommation avant de s’être pourvu d’une patente. Quant à Simonet, il n’a pas été mis en cause, mais simplement cité comme témoin.

La réprobation générale qui s’attache à l’exploitation, dans les cas analogues à celui de Simonet, est digne de remarque ; il semble qu’un sentiment instinctif porte les incrédules même à voir dans le désintéressement absolu une preuve de sincérité qui inspire une sorte de respect involontaire ; ils ne croient pas à la faculté ; ils la raillent, mais quelque chose leur dit que si elle existe, ce doit être une chose sainte qui ne peut, sans profanation, devenir un métier ; ils se bornent à dire : C’est un pauvre fou qui est de bonne foi ; mais toutes les fois que la spéculation, sous quelque forme que ce soit, s’est mêlée à une médiumnité quelconque, la critique s’est crue dispensée de tout ménagement.

Simonet guérit-il réellement ? Des personnes dignes de foi, très honorables, et qui avaient plutôt intérêt à démasquer la fraude qu’à la préconiser, nous ont cité de nombreux cas de guérisons parfaitement authentiques. Il nous semble d’ailleurs, que s’il n’avait guéri personne, il aurait déjà perdu tout crédit. Du reste, il n’a pas la prétention de guérir tout le monde ; il ne promet rien ; il dit que la guérison ne dépend pas de lui, mais de Dieu dont il n’est que l’instrument, et dont il faut implorer l’assistance ; il recommande la prière et prie lui-même. Nous regrettons beaucoup de n’avoir pu le voir pendant notre séjour à Bordeaux ; mais tous ceux qui le connaissent s’accordent à dire que c’est un homme doux, simple, modeste, sans jactance ni forfanterie, qui ne cherche point à se prévaloir d’une faculté qu’il sait pouvoir lui être retirée. Il est bienveillant pour les malades qu’il encourage par de bonnes paroles ; l’intérêt qu’il leur porte n’est point basé sur le rang qu’ils occupent ; il a autant de sollicitude pour le plus misérable que pour le plus riche ; si la guérison n’est pas instantanée, ce qui arrive le plus souvent, il y met toute la suite nécessaire.

Voilà ce qui nous a été dit. Nous ignorons quelles seront pour lui les suites de cette affaire, mais il est certain que, s’il est sincère, et s’il persévère dans les sentiments dont il paraît animé, l’assistance et la protection des bons Esprits ne lui feront pas défaut ; il verra sa faculté se développer et grandir, tandis qu’il la verrait décliner et se perdre, s’il entrait dans une mauvaise voie, si surtout il songeait à en tirer vanité.


Nota. – Au moment de mettre sous presse, nous apprenons que, par suite de la fatigue qui est résultée pour lui du long et pénible exercice de sa faculté, plus encore que pour échapper aux tracasseries dont il était l’objet, Simonet a résolu de suspendre toute réception jusqu’à nouvel ordre. Si des malades souffrent de cette abstention, un grand effet n’en a pas moins été produit.


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