Injures et violences. (1-5.) — Instructions des Esprits :
L’affabilité et la douceur. (6.)
— La patience. (7.) —
Obéissance et résignation. (8.)
— La colère. (9, 10.) |
Injures et violences.
1. Bienheureux ceux qui sont doux, parce qu’ils posséderont la terre. (Saint Matthieu, ch. V, v. 4.)
2.
Bienheureux les pacifiques, parce qu’ils seront appelés enfants de Dieu.
(Id.,
v. 9.)
3.
Vous avez appris qu’il a été dit aux Anciens : Vous ne tuerez point,
et quiconque tuera méritera d’être condamné par le jugement. — Mais
moi je vous dis que quiconque se mettra en colère contre son frère méritera
d’être condamné par le jugement ; que celui qui dira à son frère :
Racca, méritera d’être condamné par le conseil ; et que
celui qui lui dira : Vous êtes fou, méritera d’être condamné
au feu de l’enfer. (Id.,
v. 21, 22.)
4. Par ces maximes, Jésus fait une loi de la douceur, de la modération, de la mansuétude, de l’affabilité et de la patience ; 2 il condamne par conséquent la violence, la colère et même toute expression désobligeante à l’égard de ses semblables. 3 Racca était chez les Hébreux un terme de mépris qui signifiait homme de rien, et se prononçait en crachant et en détournant la tête. 4 Il va même plus loin, puisqu’il menace du feu de l’enfer celui qui dira à son frère : Vous êtes fou.
5 Il est évident qu’ici, comme en toute circonstance, l’intention aggrave ou atténue la faute ; 6 mais en quoi une simple parole peut-elle avoir assez de gravité pour mériter une réprobation si sévère ? 7 C’est que toute parole offensante est l’expression d’un sentiment contraire à la loi d’amour et de charité qui doit régler les rapports des hommes et maintenir entre eux la concorde et l’union ; 8 que c’est une atteinte portée à la bienveillance réciproque et à la fraternité ; 9 qu’elle entretient la haine et l’animosité ; 10 enfin qu’après l’humilité envers Dieu, la charité envers le prochain est la première loi de tout chrétien.
5. Mais qu’entend Jésus par ces paroles : « Bienheureux ceux qui sont doux, parce qu’ils posséderont la terre, » lui qui dit de renoncer aux biens de ce monde et promet ceux du ciel ?
2 En attendant les biens du ciel, l’homme a besoin de ceux de la terre pour vivre ; seulement il lui recommande de ne point attacher à ces derniers plus d’importance qu’aux premiers.
3 Par ces paroles, il veut dire que, jusqu’à ce jour, les biens de la terre sont accaparés par les violents au préjudice de ceux qui sont doux et pacifiques ; que ceux-ci manquent souvent du nécessaire, tandis que d’autres ont le superflu ; il promet que justice leur sera rendue sur la terre comme dans le ciel, parce qu’ils sont appelés les enfants de Dieu. 4 Lorsque la loi d’amour et de charité sera la loi de l’humanité, il n’y aura plus d’égoïsme ; le faible et le pacifique ne seront plus exploités ni écrasés par le fort et le violent. 5 Tel sera l’état de la terre lorsque, selon la loi du progrès et la promesse de Jésus, elle sera devenue un monde heureux par l’expulsion des méchants.
INSTRUCTIONS DES ESPRITS.
6. La bienveillance pour ses semblables, fruit de l’amour du prochain, produit l’affabilité et la douceur qui en sont la manifestation. 2 Cependant il ne faut pas toujours se fier aux apparences ; l’éducation et l’usage du monde peuvent donner le vernis de ces qualités. 3 Combien en est-il dont la feinte bonhomie n’est qu’un masque pour l’extérieur, un habit dont la coupe calculée dissimule les difformités cachées ! 4 Le monde est plein de ces gens qui ont le sourire sur les lèvres et le venin dans le cœur ; qui sont doux pourvu que rien ne les froisse mais qui mordent à la moindre contrariété ; dont la langue dorée, quand ils parlent en face, se change en dard empoisonné quand ils sont par-derrière.
5 A cette classe appartiennent encore ces hommes, aux dehors bénins, qui, chez eux, tyrans domestiques, font souffrir à leur famille et à leurs subordonnés le poids de leur orgueil et de leur despotisme ; ils semblent vouloir se dédommager de la contrainte qu’ils se sont imposée ailleurs ; n’osant faire acte d’autorité sur des étrangers qui les remettraient à leur place, ils veulent au moins se faire craindre de ceux qui ne peuvent leur résister ; leur vanité jouit de pouvoir dire : « Ici je commande et je suis obéi ; » sans songer qu’ils pourraient ajouter avec plus de raison : « Et je suis détesté. »
6 Il ne suffit pas que des lèvres découlent le lait et le miel ; si le cœur n’y est pour rien, c’est de l’hypocrisie. 7 Celui dont l’affabilité et la douceur ne sont pas feintes, ne se dément jamais ; il est le même devant le monde et dans l’intimité ; 8 il sait d’ailleurs que si l’on trompe les hommes par des apparences, on ne trompe pas Dieu. (LAZARE. Paris, 1861.)
7. La douleur est une bénédiction que Dieu envoie à ses élus ; ne vous affligez donc pas quand vous souffrez, mais bénissez au contraire le Dieu tout-puissant qui vous a marqués par la douleur ici-bas pour la gloire dans le ciel.
2 Soyez patients ; c’est une charité aussi que la patience, et vous devez pratiquer la loi de charité enseignée par le Christ, envoyé de Dieu. 3 La charité qui consiste dans l’aumône donnée aux pauvres est la plus facile des charités ; 4 mais il en est une bien plus pénible et conséquemment bien plus méritoire, c’est de pardonner à ceux que Dieu a placés sur notre route pour être les instruments de nos souffrances et mettre notre patience à l’épreuve.
5 La vie est difficile, je le sais ; elle se compose de mille riens qui sont des coups d’épingle et finissent par blesser ; mais il faut regarder aux devoirs qui nous sont imposés, aux consolations et aux compensations que nous avons d’un autre côté, et alors nous verrons que les bénédictions sont plus nombreuses que les douleurs. 6 Le fardeau semble moins lourd quand on regarde en haut que lorsqu’on courbe son front vers la terre.
7 Courage, amis, le Christ est votre modèle ; il a plus souffert qu’aucun de vous, et il n’avait rien à se reprocher, tandis que vous, vous avez à expier votre passé et à vous fortifier pour l’avenir. 8 Soyez donc patients ; soyez chrétiens, ce mot renferme tout. (UN ESPRIT AMI. Le Havre, 1862.)
8. La doctrine de Jésus enseigne partout l’obéissance et la résignation, deux vertus compagnes de la douceur, très militantes quoique les hommes les confondent à tort avec la négation du sentiment et de la volonté. 2 L’obéissance est le consentement de la raison ; 3 la résignation est le consentement du cœur ; 4 toutes deux sont des forces actives, car elles portent le fardeau des épreuves que la révolte insensée laisse retomber. 5 Le lâche ne peut être résigné, pas plus que l’orgueilleux et l’égoïste ne peuvent être obéissants. 6 Jésus a été l’incarnation de ces vertus méprisées par la matérielle antiquité. 7 Il vint au moment où la société romaine périssait dans les défaillances de la corruption ; il vint faire luire, au sein de l’humanité affaissée, les triomphes du sacrifice et du renoncement charnel.
8 Chaque époque est ainsi marquée au coin de la vertu ou du vice qui doit la sauver ou la perdre. 9 La vertu de votre génération est l’activité intellectuelle ; son vice est l’indifférence morale. 10 Je dis seulement activité, car le génie s’élève tout à coup et découvre à un seul les horizons que la multitude ne verra qu’après lui, tandis que l’activité est la réunion des efforts de tous pour atteindre un but moins éclatant, mais qui prouve l’élévation intellectuelle d’une époque. 11 Soumettez-vous à l’impulsion que nous venons donner à vos esprits ; obéissez à la grande loi du progrès qui est le mot de votre génération. 12 Malheur à l’esprit paresseux, à celui qui bouche son entendement ! Malheur ! car nous qui sommes les guides de l’humanité en marche, nous le frapperons du fouet, et forcerons sa volonté rebelle dans le double effort du frein et de l’éperon ; 13 toute résistance orgueilleuse devra céder tôt ou tard ; mais bienheureux ceux qui sont doux, car ils prêteront une oreille docile aux enseignements. (LAZARE. Paris, 1863.)
9. L’orgueil vous porte à vous croire plus que vous n’êtes ; 2 à ne pouvoir souffrir une comparaison qui puisse vous rabaisser ; à vous voir, au contraire, tellement au-dessus de vos frères, soit comme esprit, soit comme position sociale, soit même comme avantages personnels, 3 que le moindre parallèle vous irrite et vous froisse ; et qu’advient-il alors ? c’est que vous vous livrez à la colère.
4 Cherchez l’origine de ces accès de démence passagère qui vous assimilent à la brute en vous faisant perdre le sang-froid et la raison ; cherchez, et vous trouverez presque toujours pour base l’orgueil froissé. 5 N’est-ce pas l’orgueil froissé par une contradiction qui vous fait rejeter les observations justes, qui vous fait repousser avec colère les plus sages conseils ? 6 Les impatiences même que causent des contrariétés souvent puériles, tiennent à l’importance que l’on attache à sa personnalité devant laquelle on croit que tout doit plier.
7 Dans sa frénésie, l’homme colère s’en prend à tout, à la nature brute, aux objets inanimés qu’il brise, parce qu’ils ne lui obéissent pas. Ah ! si dans ces moments-là il pouvait se voir de sang-froid, il aurait peur de lui, ou se trouverait bien ridicule ! Qu’il juge par là de l’impression qu’il doit produire sur les autres. Quand ce ne serait que par respect pour lui-même, il devrait s’efforcer de vaincre un penchant qui fait de lui un objet de pitié.
8 S’il songeait que la colère ne remédie à rien, qu’elle altère sa santé, compromet même sa vie, il verrait qu’il en est la première victime ; 9 mais une autre considération devrait surtout l’arrêter, c’est la pensée qu’il rend malheureux tous ceux qui l’entourent ; s’il a du cœur, n’est-ce pas un remords pour lui de faire souffrir les êtres qu’il aime le plus ? Et quel regret mortel si, dans un accès d’emportement, il commettait un acte qu’il eût à se reprocher toute sa vie !
10 En somme, la colère n’exclut pas certaines qualités du cœur ; mais elle empêche de faire beaucoup de bien, et peut faire faire beaucoup de mal ; cela doit suffire pour exciter à faire des efforts pour la dominer. 11 Le spirite est en outre sollicité par un autre motif, c’est qu’elle est contraire à la charité et à l’humilité chrétiennes. (UN ESPRIT PROTECTEUR. Bordeaux, 1863.)
10. D’après l’idée très fausse qu’on ne peut pas réformer sa propre nature, l’homme se croit dispensé de faire des efforts pour se corriger des défauts dans lesquels il se complaît volontiers, ou qui exigeraient trop de persévérance ; 2 c’est ainsi, par exemple, que l’homme enclin à la colère s’excuse presque toujours sur son tempérament ; 3 plutôt que de s’avouer coupable, il rejette la faute sur son organisation, accusant ainsi Dieu de ses propres méfaits. 4 C’est encore une suite de l’orgueil que l’on trouve mêlé à toutes ses imperfections.
5 Sans contredit, il est des tempéraments qui se prêtent plus que d’autres aux actes violents, comme il est des muscles plus souples qui se prêtent mieux aux tours de force ; mais ne croyez pas que là soit la cause première de la colère, et soyez persuadés qu’un Esprit pacifique, fût-il dans un corps bilieux, sera toujours pacifique ; et qu’un Esprit violent, dans un corps lymphatique, n’en sera pas plus doux ; seulement, la violence prendra un autre caractère ; n’ayant pas un organisme propre à seconder sa violence, la colère sera concentrée, et dans l’autre cas elle sera expansive.
6 Le corps ne donne pas plus la colère à celui qui ne l’a pas, qu’il ne donne les autres vices ; toutes les vertus et tous les vices sont inhérents à l’Esprit ; sans cela où serait le mérite et la responsabilité ? 7 L’homme qui est contrefait ne peut se rendre droit parce que l’Esprit n’y est pour rien, mais il peut modifier ce qui est de l’Esprit quand il en a la ferme volonté. 8 L’expérience ne vous prouve-t-elle pas, spirites, jusqu’où peut aller la puissance de la volonté, par les transformations vraiment miraculeuses que vous voyez s’opérer ? Dites-vous donc que l’homme ne reste vicieux que parce qu’il veut rester vicieux ; mais que celui qui veut se corriger le peut toujours, autrement la loi du progrès n’existerait pas pour l’homme. (HAHNEMANN. Paris, 1863.)
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