Création des esprits. — Nature et
immatérialité des esprits. — Forme des esprits. — Périsprit.
— Le monde spirite est le monde normal, primitif. — Les esprits
habitent l’espace universel. — Don d’ubiquité attribué aux esprits.
— Faculté de voir chez les esprits. — Communications mutuelles
des esprits. — État primitif des esprits ; leur perfectionnement
progressif. — Différents ordres d’esprits. — Tous les esprits
tendent à la perfection. — Chute des anges. — Démons. — Fonctions
et attributions des esprits. — Facultés intellectuelles des
esprits ; leurs connaissances sur le passé et l’avenir. — Peines
et jouissances des esprits. — Familles d’esprits. (Questions
38 à 79 c.) |
38. —
Les esprits ont-ils eu un commencement, ou bien sont-ils, comme Dieu,
de toute éternité ? ( † )
« Si les esprits n’avaient point eu de commencement, ils seraient égaux
à Dieu, tandis qu’ils sont sa création et soumis à sa volonté. Dieu
est de toute éternité, cela est incontestable ; mais savoir quand et
comment il nous a créés, nous n’en savons rien. Tu peux dire que nous
sommes sans commencement, si tu entends par là que Dieu étant éternel,
il a dû créer sans relâche ; mais quand et comment chacun de nous a
été fait, je te dis encore, nul ne le sait : c’est là qu’est le mystère.
»
Dieu a créé des êtres intelligents qui peuplent l’univers
en dehors du monde matériel, et que l’on désigne sous le nom d’esprits.
L’origine des esprits, comme la cause première de toutes choses, est
un des secrets de Dieu.
Les esprits eux-mêmes ignorent de quelle manière ils ont été formés.
Ils savent qu’ils sont une création de Dieu, parce qu’ils sont soumis
à sa volonté ; mais il est pour eux des mystères comme pour toutes les
créatures.
39. —
Les esprits sont-ils immatériels ou formés d’une substance quelconque
? Pouvons-nous connaître leur nature intime ? ( † )
« Comment peut-on définir une chose quand on manque de termes de comparaison
et avec un langage insuffisant ? Un aveugle-né peut-il définir la lumière
? Immatériel n’est pas le mot ; incorporel serait plus exact, car tu
dois bien comprendre que l’esprit étant une création doit être quelque
chose ; c’est une matière quintessenciée, mais sans analogue pour vous,
et si éthérée qu’elle ne peut tomber sous vos sens grossiers. »
La nature intime des esprits, comme leur origine, est un
mystère qu’il ne nous est pas donné de connaître ici-bas.
Nous disons que les esprits sont immatériels, parce que leur essence
diffère de tout ce que nous connaissons sous le nom de matière.
Un peuple d’aveugles de naissance n’aurait point de termes pour exprimer
la lumière et ses effets ; de même pour l’essence des êtres surhumains,
nous sommes de véritables aveugles. Nous ne pouvons les définir que
par des comparaisons toujours imparfaites.
40. —
Les esprits sont-ils des êtres distincts de la divinité, ou bien ne
seraient-ils que des émanations ou portions de la divinité et appelés,
pour cette raison, fils ou enfants de Dieu ? ( † )
« Mon Dieu, c’est son œuvre, absolument comme un homme qui fait une
machine ; cette machine est l’œuvre de l’homme et non pas lui. Tu sais
que quand l’homme fait une chose belle, utile, il l’appelle son enfant,
sa création. Eh bien ! il en est de même de Dieu ; nous sommes ses enfants,
puisque nous sommes son œuvre. »
Les esprits font partie de la création, et, comme tels,
sont regardés comme enfants de Dieu ; mais ce sont des êtres distincts
de Dieu même, comme l’ouvrage est distinct de l’ouvrier. S’ils n’étaient
que les émanations ou le rayonnement de la divinité, ils participeraient
de toutes ses perfections infinies.
41. —
Les esprits ont-ils une forme déterminée, limitée et constante ? ( † )
« A vos yeux, non ; aux nôtres, oui ; c’est, si vous voulez, une flamme,
une lueur ou une étincelle. »
41a —
Quelle est la couleur de cette flamme ? ( † )
« Cela dépend du degré de perfection. Quand l’esprit est pur, elle peut
se comparer au rubis. »
Les esprits n’ont par eux-mêmes aucune forme ni aucune étendue
déterminée et constante dans le sens que nous attachons à ces mots.
Une flamme, lueur ou étincelle éthérée, une nuance variant du sombre
à l’éclat du rubis selon la pureté de l’esprit, pourrait seule nous
en donner une idée faible et incomplète.
42. —
L’esprit proprement dit est-il à découvert, ou, comme quelques-uns l’ont
dit, environné d’une substance quelconque ? ( † )
« L’esprit est enveloppé d’une substance vaporeuse pour toi, mais encore
bien grossière pour nous ; assez vaporeuse cependant pour pouvoir s’élever
dans ton atmosphère et se transporter où il veut. »
42 a. —
Où l’esprit puise-t-il cette enveloppe ? ( † )
« Dans le fluide universel de chaque globe. »
42 b. —
Cette enveloppe est-elle perceptible, et affecte-t-elle des formes déterminées
? ( † )
« Oui, une forme au gré de l’esprit, et c’est ainsi qu’il vous apparaît
quelquefois. »
Comme le germe d’un fruit est entouré du périsperme, de
même l’esprit proprement dit est environné d’une enveloppe que, par
comparaison, on peut appeler périsprit.
Le périsprit est d’une nature semi-matérielle, c’est-à-dire intermédiaire
entre l’esprit et la matière. Il prend des formes déterminées à la volonté
de l’esprit et peut, dans certains cas, affecter nos sens.
La substance du périsprit est puisée dans le fluide universel. Elle
est plus ou moins éthérée selon l’état constitutif de chaque globe.
L’esprit en passant d’un monde à l’autre change d’enveloppe ou de périsprit,
comme nous changeons de vêtements.
43. Les
esprits ont-ils chacun leur individualité ?
« Oui, ils ne se confondent jamais.
Les esprits ont chacun leur individualité et leur existence
propre ; ils se distinguent les uns des autres sans jamais se confondre.
44. —
Les esprits constituent-ils un monde à part, en dehors de celui que
nous voyons ? ( † )
« Oui, le monde des esprits ou des intelligences incorporelles. »
Les esprits constituent tout un monde incorporel, invisible
pour nous dans notre état normal, tandis que les êtres corporels constituent
le monde matériel et visible.
45. —
Quel est celui des deux, le monde spirite ou le monde corporel, qui
est le principal dans l’ordre des choses ? ( † )
« Le monde spirite. »
45 a. —
Le monde spirite est-il préexistant à tout ?
« Préexistant et survivant à tout. » ( † )
45 b. —
Le monde corporel pourrait-il cesser d’exister, ou n’avoir jamais existé,
sans altérer l’essence du monde spirite ? ( † )
« Oui, car ils sont indépendants. »
Le monde spirite ou des esprits est le monde normal, primitif,
préexistant et survivant à tout. Le monde corporel est secondaire, transitoire,
passager et subordonné ; il est périssable, parce que la matière, en
se transformant, produit incessamment de nouveaux êtres animés ou inanimés
; il pourrait cesser d’exister, ou n’avoir jamais existé sans altérer
l’essence du monde spirite.
46. —
Les esprits occupent-ils une région déterminée et circonscrite dans
l’espace universel ? ( † )
« Non, ils sont partout. »
46 a. —
Y en a-t-il autour de nous ; à nos côtés ?
« Oui, et qui vous observent. »
Les esprits n’habitent point un lieu déterminé ; ils sont
partout, l’univers est leur domaine ; les espaces infinis en sont peuplés
à l’infini. Ils sont autour de nous, à nos côtés, aussi bien que dans
les régions les plus éloignées, et jusque dans les entrailles de la
terre.
47. Les
esprits se transportent-ils instantanément d’un lieu à un autre ?
« Oui. »
47 a. —
Les esprits mettent-ils un temps quelconque à franchir l’espace ? ( † )
« Oui, mais rapide comme la pensée. »
47 b. —
La matière fait-elle obstacle aux esprits ? ( † )
« Non, ils pénètrent tout. »
L’essence éthéréenne des esprits leur permet de franchir
les espaces, et de se transporter instantanément d’un lieu à un autre
et d’un monde à l’autre.
La matière ne leur fait point obstacle ; ils pénètrent tout, s’introduisent
partout : l’air, la terre, les eaux, le feu même leur sont également
accessibles.
48. –
Le même esprit peut-il se diviser, ou exister sur plusieurs points à
la fois ? ( † )
« Non, il ne peut y avoir division du même esprit ; chacun est un centre
qui rayonne de différents côtés, et c’est pour cela qu’il paraît être
en plusieurs endroits à la fois. Tu vois le soleil, il n’est qu’un,
et pourtant il rayonne tout à l’entour, et porte ses rayons fort loin
; mais malgré cela il ne se divise pas. »
Chaque esprit est une unité indivisible qui ne peut, par
conséquent, exister à la fois sur plusieurs points différents ; mais
chacun d’eux est un centre ou foyer intellectuel qui rayonne de divers
côtés comme le cerveau rayonne la pensée, sans pour cela se diviser.
C’est en ce sens seulement qu’on doit entendre le don d’ubiquité attribué
aux esprits.
49. —
La vue, chez les esprits, est-elle circonscrite comme dans les êtres
corporels ? ( † )
« Non. »
49 a. —
Où réside-t-elle ?
« Dans tout leur être. » ( † )
49 b. —
Les esprits peuvent-ils voir simultanément sur deux hémisphères différents
? ( † )
« Oui, ils voient partout, pour eux point de ténèbres. »
La faculté de voir, chez les esprits, n’est point circonscrite
comme dans les êtres corporels ; c’est une propriété inhérente à leur
nature, et qui réside dans tout leur être comme la lumière réside dans
un corps lumineux ; une sorte de lucidité universelle qui s’étend à
tout, embrasse à la fois l’espace, les temps et les choses, et pour
laquelle il n’y a ni ténèbres, ni obstacles matériels.
50. —Les
esprits peuvent ils se cacher les uns des autres ? ( † )
« Non, ils peuvent s’éloigner un peu ; mais ils se voient toujours.
»
La faculté de voir, pour les esprits, étant sans limite,
il en résulte qu’ils ne peuvent se soustraire les uns aux autres. Ils
peuvent s’éloigner, mais ils se voient toujours, et nulle retraite ne
peut les dérober à la vue.
51. —
Les esprits peuvent-ils se dissimuler leurs pensées réciproquement ?
( † )
« Non, pour eux tout est à découvert, surtout lorsqu’ils sont parfaits.
»
De la vue et de la pénétration indéfinies des esprits découle
la connaissance de leurs pensées réciproques. Rien ne saurait leur être
dissimulé, surtout lorsqu’ils sont parfaits.
52. —
Comment les esprits communiquent-ils entre eux ? ( † )
« Ils se voient et se comprennent entre eux ; la parole est matérielle
: c’est le reflet de l’esprit. »
De l’intuition de leurs pensées réciproques découle, pour
les esprits, le mode de leurs communications ; ils se voient et se comprennent
sans avoir besoin de la parole.
53. —
Les esprits ont-ils été créés bons ou mauvais, ou bien y en a-t-il de
bons et de mauvais ? (Réponse ci-à côté.) [Au-dessous.] ( † )
« Dieu a créé tous les esprits simples et ignorants, c’est-à-dire sans
science. Il leur a donné à chacun une mission dans le but de les éclairer
et de les faire arriver progressivement à la perfection par la connaissance
de la vérité et pour les rapprocher de lui. Le bonheur éternel et sans
mélange est pour eux dans cette perfection. »
« Les esprits acquièrent ces connaissances en passant par les épreuves
que Dieu leur impose. Les uns acceptent ces épreuves avec soumission
et arrivent plus promptement au but de leur destinée, d’autres ne les
subissent qu’avec murmure et restent ainsi, par leur faute, éloignés
de la perfection et de la félicité promise. »
53 a. —
D’après cela les esprits sembleraient être, à leur origine, comme sont
les enfants, ignorants et sans expérience, mais acquérant peu à peu
les connaissances qui leur manquent en parcourant les différentes phases
de la vie ? ( † )
« Oui, la comparaison est juste ; l’enfant rebelle reste ignorant et
imparfait ; il profite plus ou moins selon sa docilité ; mais la vie
de l’homme a un terme, et celle des esprits s’étend dans l’infini. »
54. —
Les esprits sont-ils tous égaux entre eux ? ( † )
« Non, ils sont de différents ordres. »
54 a. —
Sur quoi est fondée la différence qui existe entre les esprits ?
« Sur le degré de perfection auquel ils sont parvenus. » ( † )
54 b. —
Combien y a-t-il d’ordres ou de degrés de perfection dans les esprits
? ( † )
« Le nombre est illimité, mais on peut le réduire à trois principaux.
»
Le monde spirite se compose ainsi d’esprits plus ou moins
parfaits. Cette différence constitue entre eux une hiérarchie fondée
sur le degré de purification auquel ils sont parvenus.
On peut les diviser en trois ordres principaux ; mais ce nombre n’a
rien d’absolu, attendu que chaque ordre présente une infinité de degrés.
55. —
Quels sont les esprits du premier ordre ? ( † )
« Les purs esprits, ceux qui sont arrivés à la perfection. » ( † )
55 a. —
Qu’est-ce que les anges, archanges ou séraphins ? ( † )
« Les purs Esprits. »
55 b. —
Les anges sont-ils des êtres d’une nature différente des autres esprits
? ( † )
« Non, tous ont parcouru les différents degrés de l’échelle ; mais comme
nous l’avons dit, les uns ont accompli leur mission sans murmurer et
sont arrivés plus vite. » ( † )
Au premier rang de la hiérarchie spirite sont les esprits
arrivés à la perfection. Ce sont les purs esprits qui n’ayant plus d’épreuves
à subir sont pour l’éternité dans la gloire de Dieu.
On les désigne quelquefois sous les noms d’anges, archanges ou séraphins.
Les anges ne constituent point des êtres d’une nature spéciale ; ils
ont, comme tous les esprits, parcouru les différents ordres. L’homme
qui a acquis le plus de sagesse et d’expérience n’est point pour cela
d’une autre nature que dans son enfance.
56. —
Quels sont les esprits du second ordre ? ( † )
« Ceux qui sont arrivés au milieu de l’échelle. »
56 a. —
Qu’est-ce qui caractérise les esprits du second ordre ? ( † )
« Le désir du bien qui est leur préoccupation. »
56 b. —
N’ont-ils que le désir du bien ; ont-ils aussi le pouvoir de le faire
? ( † )
« Ils ont ce pouvoir suivant le degré de leur perfection ; mais tous
ont encore des épreuves à subir. »
Les esprits du second ordre sont ceux qui ont encore des
épreuves à subir. Ils sont intermédiaires entre les purs esprits et
les esprits inférieurs, et se rapprochent plus ou moins des uns ou des
autres selon leur degré de perfection.
Ils sont assez épurés pour n’avoir que le désir du bien, mais pas assez
élevés pour avoir la souveraine science ; car la perfection n’est acquise
qu’à ceux qui ont parcouru tous les degrés de la vie spirituelle.
57. —
Quels sont les esprits du troisième ordre ? ( † )
« Ceux qui sont encore en bas de l’échelle : les esprits imparfaits.
»
57 a. —
Qu’est-ce qui caractérise les esprits du troisième ordre ? ( † )
« L’ignorance et toutes les mauvaises passions qui retardent leur perfectionnement.
»
57 b. —
Tous les esprits du troisième ordre sont-ils essentiellement mauvais
?
« Non ; les uns ne font ni bien ni mal ; d’autres, au contraire, se
plaisent au mal et sont satisfaits quand ils trouvent l’occasion de
le faire. »
57 c. —
Que doit-on entendre par esprits follets ?
« Follets, farfadets, lutins c’est la même chose ; ce sont des esprits
légers, plus brouillons que méchants, qui se plaisent plutôt à la malice
qu’à la méchanceté, et qui trouvent leur plaisir à mystifier et à causer
de petites contrariétés. » ( † )
Les esprits du troisième ordre sont les esprits imparfaits,
c’est-à-dire ceux qui ont encore presque tous les échelons à parcourir.
Ils sont caractérisés par l’ignorance, l’orgueil, l’égoïsme et toutes
les mauvaises passions qui en sont la suite.
On peut les diviser en trois classes principales :
1º Les esprits neutres : ceux qui ne sont ni assez bons pour
faire le bien, ni assez mauvais pour faire le mal. ( † )
2º Les esprits impurs : ceux qui sont enclins au mal et en font
l’objet de leurs préoccupations. ( † )
3º Les esprits follets : ils sont légers, malins, inconséquents,
plus brouillons que méchants ; se mêlant à tout, se plaisant à faire
de petites peines et de petites joies, à induire malicieusement en erreur
par des mystifications. On les désigne aussi sous les noms de lutins
ou farfadets. ( † )
58. —
Les esprits sont-ils bons ou mauvais par leur nature, ou bien sont-ce
les mêmes esprits qui s’améliorent ? ( † )
« Les mêmes esprits qui s’améliorent. »
58 a. —
Les esprits appartiennent-ils perpétuellement au même ordre ?
« En s’améliorant ils passent d’un ordre inférieur dans un ordre supérieur.
» ( † )
Les esprits ne sont pas bons ou mauvais par l’essence même
de leur nature, et n’appartiennent pas perpétuellement au même ordre.
Ce sont tous les mêmes esprits qui s’améliorent, et qui, en se purifiant,
passent d’un ordre inférieur dans un ordre supérieur.
59. —
Y a-t-il des esprits qui resteront à perpétuité dans les rangs inférieurs
? ( † )
« Non, tous deviendront parfaits ; ils changent, mais c’est long ; car,
comme nous l’avons dit une autre fois, un père juste et miséricordieux
ne peut bannir éternellement ses enfants. Tu voudrais donc que Dieu
si grand, si bon, si juste, soit pire que vous ne l’êtes vous-mêmes
! »
59 a. —
Dépend-il des esprits d’abréger le temps de leurs épreuves ? ( † )
« Certainement ; ils arrivent plus ou moins vite selon leurs désirs
et leur soumission à la volonté de Dieu. Un enfant docile ne s’instruit-il
pas plus vite qu’un enfant rétif ? »
Il n’est pas d’esprits condamnés à rester perpétuellement
dans les rangs inférieurs. Tous s’améliorent en passant par les épreuves
auxquelles ils sont soumis, et atteindront le degré supérieur dans la
vie éternelle.
L’amélioration successive des esprits est dans les vues de la Providence.
Tous progressent par le fait d’une puissance qui les domine, comme l’homme
passe de l’enfance à l’âge mûr ; tous changent et se transforment dans
un temps plus ou moins long suivant leur désir, car il dépend de leur
volonté d’arriver plus ou moins vite.
60. —
Les esprits peuvent-ils dégénérer ? ( † )
« Non ; à mesure qu’ils avancent ils comprennent ce qui les éloignait
de la perfection. Quand l’esprit a fini une épreuve, il a la science
et il ne l’oublie pas. »
Les esprits arrivés à un degré supérieur ne peuvent dégénérer
ni faillir de nouveau. Ils ont la connaissance du bien et du mal ; l’expérience
qu’ils ont acquise les empêche de rétrograder.
61. —
Que penser de la croyance aux esprits déchus ?
« Nous avons déjà dit que les esprits ont tous été créés ignorants et
sans expérience ; ils apprennent la vérité par les épreuves auxquelles
ils sont soumis et dans les missions qui leur sont données. Ceux qui
accomplissent leur mission sans murmure avancent, les autres restent
en arrière. Ils ne sont donc pas déchus ; ils sont, si tu veux, rebelles
; c’est comme un enfant indocile envers son père. Mais Dieu n’est pas
impitoyable ; il leur fournit sans cesse les moyens de s’améliorer ;
c’est à eux d’en profiter plus ou moins promptement, selon leur désir,
et c’est là qu’est le libre arbitre. »
L’idée de la chute des esprits suppose une dégradation ;
or les esprits ayant tous le même point de départ qui est celui de l’ignorance
et de l’inexpérience, ils ne peuvent que s’élever ou rester stationnaires
; il ne peut donc y avoir chute dans le sens vulgaire attaché à ce mot.
Comme leur élévation dépend de leur désir, et de leur soumission à la
volonté de Dieu, et que quelques-uns n’ont point accepté leur mission
sans murmure, il y a plutôt rébellion de leur part, et ils en sont punis
par eux-mêmes en restant plus longtemps soumis aux peines inhérentes
à leur infériorité, mais non éternellement, car tôt ou tard ils comprennent
leur faute et avancent peu à peu. Ce ne sont point des anges rebelles,
puisque les anges sont des esprits arrivés à la perfection et qui ne
peuvent dégénérer.
62. —
Y a-t-il des démons dans le sens attaché à ce mot ? ( † )
« S’il y avait des démons, ils seraient l’œuvre de Dieu, et Dieu serait-il
juste et bon d’avoir fait des êtres éternellement voués au mal et malheureux
? S’il y a des démons, c’est dans ton monde grossier et autres semblables
qu’ils résident ; ce sont ces hommes hypocrites qui font d’un Dieu juste
un Dieu méchant et vindicatif, et qui croient lui être agréables par
les abominations qu’ils commettent en son nom. »
Les démons, selon l’acception vulgaire du mot, supposent
des êtres essentiellement et perpétuellement mauvais et malfaisants
; ils seraient, comme toutes choses, la création de Dieu ; or Dieu qui
est souverainement juste et bon ne peut avoir créé des êtres préposés
au mal par leur nature et condamnés pour l’éternité. S’ils n’étaient
pas l’œuvre de Dieu, ils seraient donc comme lui de toute éternité,
ou bien il y aurait plusieurs puissances souveraines.
63. —
Les esprits ont-ils autre chose à faire qu’à s’améliorer personnellement
? ( † )
« Ils concourent à l’harmonie de l’univers en exécutant les volontés
de Dieu dont ils sont les ministres. »
63 a. —
Les esprits inférieurs et imparfaits remplissent-ils aussi un rôle utile
dans l’univers ? ( † )
« Tous ont leur mission utile. Est-ce que le dernier maçon ne concourt
pas à bâtir l’édifice aussi bien que l’architecte ? »
Les esprits sont les ministres de Dieu et les agents de
sa volonté ; c’est par eux qu’il gouverne le monde : tous, depuis le
premier jusqu’au dernier, concourent à l’harmonie de l’univers ; chacun
a son rôle dans l’ordre général selon son rang ; c’est en cela que consiste
leur mission, et c’est en l’accomplissant qu’ils s’améliorent et acquièrent
les connaissances qui doivent un jour les rendre parfaits.
64. —
Les esprits ont-ils chacun des attributs spéciaux ? ( † )
« C’est-à-dire que tous nous devons habiter partout, et acquérir la
connaissance de toutes choses en présidant successivement à toutes les
parties de l’univers. Mais, nomme il est dit dans l’Ecclésiaste, ( † )
il y a un temps pour tout ; ainsi tel accomplit aujourd’hui sa destinée
en ce monde, tel l’accomplira ou l’a accomplie dans un autre temps,
dans la terre, dans l’eau, dans l’air, etc. »
Pour s’instruire de toutes choses, les esprits doivent successivement
parcourir les différentes phases de l’ordre physique et de l’ordre moral
de l’univers. Ainsi tandis que les uns président dans la terre aux phénomènes
géologiques, d’autres président aux phénomènes de l’air, des eaux, de
la végétation, de la naissance et de la mort des êtres vivants, de la
production et de la destruction de toutes choses. C’est par leur intermédiaire
que s’accomplissent les révolutions qui changent la face des mondes..
65. —
Les fonctions que remplissent les esprits dans l’ordre des choses sont-elles
permanentes pour chacun, et sont-elles dans les attributions exclusives
de certaines classes ? ( † )
« Tous doivent parcourir les différents degrés de l’échelle pour se
perfectionner. Dieu qui est juste n’a pu vouloir donner aux uns la science
sans travail, tandis que d’autres ne l’acquièrent qu’avec peine. »
Les fonctions accomplies par les esprits ne sont ni permanentes
pour chacun, ni dans les attributions exclusives de certaines classes,
car il faut que tous accomplissent leur destinée pour atteindre à la
perfection. De même, parmi les hommes, nul n’arrive au suprême degré
d’habileté dans un art quelconque, sans avoir puisé les connaissances
nécessaires dans la pratique des parties les plus intimes de cet art.
66. —
L’idée des gnomes, des sylphes et autres génies créés par l’imagination
semblerait avoir sa source dans la connaissance acquise ou dans l’intuition
des diverses fonctions des esprits ?
« Sans doute ; dans ce que vous appelez des fables il y a souvent de
grandes vérités. La plupart ont leur source dans la révélation des choses
d’en haut, mais on les a prises à la lettre ; c’est là le tort. »
L’idée des fonctions que remplissent les esprits, comme
la doctrine spirite elle-même, se retrouve, sous des formes diverses,
dans la croyance de tous les peuples et à tous les âges, avec cette
différence qu’on a fait des êtres distincts de ce qui n’est qu’un attribut
temporaire. C’est ainsi que l’imagination a créé les gnomes, les sylphes,
les nymphes et toute la phalange des génies.
67. —
Les esprits ont-ils des perceptions qui nous sont inconnues ?
« Cela est certain, puisque vos facultés sont bornées par vos organes.
L’intelligence est un attribut de l’esprit, mais qui se manifeste plus
librement quand il n’a pas d’entraves. » ( † )
L’intelligence est un attribut essentiel de la nature spirite
et ne fait qu’un avec l’esprit. La faculté de connaître est la conséquence
de l’intelligence. Cette faculté n’étant point circonscrite par des
organes matériels, s’exerce librement et sans entraves ; c’est pourquoi
les esprits ont des perceptions qui nous sont inconnues.
68. —
Les perceptions et les connaissances des esprits sont-elles indéfinies
; en un mot, savent-ils toutes choses ? ( † )
« Non plus ils approchent de la perfection, plus ils savent. »
Les perceptions et les connaissances ne sont point illimitées
pour tous les esprits ; leur étendue est en raison du degré de pureté
et de perfection auquel ils sont parvenus.
69. —
Les esprits comprennent-ils la durée comme nous ? ( † )
« Non, et c’est ce qui fait que vous ne nous comprenez pas toujours
quand il s’agit de fixer des dates ou des époques. »
L’intelligence des esprits embrasse l’éternité ; la durée,
pour eux s’efface pour ainsi dire, et les siècles, si longs pour nous,
ne sont à leurs yeux que de courts instants.
70. —
Les esprits ont-ils du présent une idée plus précise et plus juste que
nous ? ( † )
« A peu près comme celui qui voit clair a une idée plus juste des choses
que l’aveugle. Les esprits voient ce que vous ne voyez pas ; ils jugent
donc autrement que vous : mais encore une fois cela dépend de leur élévation.
»
La faculté de tout voir, jointe à l’étendue des perceptions
intellectuelles et à la pénétration de la pensée, donne aux esprits
une connaissance absolue du présent, leur permet d’embrasser d’un coup
d’œil tous les événements contemporains, et par là de juger les choses
plus sainement que nous ne pouvons le faire nous-mêmes, resserrés que
nous sommes par notre enveloppe terrestre.
71. —
Comment les esprits ont-ils la connaissance du passé ? ( † )
« Le passé, quand nous nous en occupons, est un présent, absolument
comme toi tu te rappelles une chose qui t’a frappé dans le cours de
ton exil. Seulement, comme nous n’avons plus le voile matériel qui obscurcit
ton intelligence, nous nous rappelons des choses qui sont effacées pour
toi. »
71 a. —
La connaissance du passé est-elle sans limite pour les esprits ? ( † )
« Non, tout ne leur est pas connu : leur création d’abord. »
La durée en s’effaçant retrace le passé à la mémoire des
esprits, et leur montre comme présents les événements les plus éloignés
de nous. Ils connaissent donc le passé, sauf l’origine et le principe
des choses qui, pour eux comme pour nous, sont enveloppés d’un voile
mystérieux, jusqu’à ce qu’ils aient atteint la perfection suprême.
L’étendue des perceptions des esprits étant subordonnée à leur élévation,
la connaissance qu’ils ont du passé, même pour les choses vulgaires,
est en raison de cette élévation.
72. —
Les esprits connaissent-ils l’avenir ? ( † )
« Cela dépend encore de leur perfection ; souvent ils ne font que l’entrevoir,
mais il ne leur est pas toujours permis de le révéler ; quand
ils le voient il leur semble présent. »
72 a. —
Les esprits arrivés à la perfection absolue ont-ils une connaissance
complète de l’avenir ? ( † )
« Complète n’est pas le mot, car Dieu seul est le souverain maître,
et nul ne peut l’égaler. »
La connaissance de l’avenir a, pour les esprits,
des limites qu’il ne leur est pas donné de franchir ; ils ne le connaissent
que suivant le degré de leur perfection. Selon ce degré ils le préjugent,
avec plus ou moins d’exactitude, comme conséquence du présent ; ils
l’entrevoient, et peuvent, si c’est dans les vues de la Providence,
en avoir la révélation partielle. L’avenir alors se déroule devant eux
: ils le voient comme ils voient le passé et le présent.
73. —
Les esprits éprouvent-ils nos besoins et nos souffrances physiques,
la fatigue et le besoin du repos ? ( † )
« Non ; ils sont esprits ; c’est-à-dire qu’ils les connaissent, parce
qu’ils les ont subis, mais ils ne les éprouvent pas comme vous matériellement.
»
En raison de leur essence spirituelle, les esprits ne peuvent
être sujets aux influences qui affectent la matière. Ils n’éprouvent
ni nos besoins, ni nos souffrances physiques, ni la fatigue, ni la nécessité
du repos, mais ils les comprennent.
74. —
Les esprits sont-ils heureux ou malheureux ?
« Heureux ou malheureux selon leur perfection. »
74 a. —
Y en a-t-il qui jouissent d’un bonheur inaltérable ?
« Oui, les purs esprits ; tous y arrivent ; cela dépend d’eux.
»
Les peines et les jouissances des esprits sont inhérentes
à leur nature et au degré de leur perfection.
Le bonheur suprême et
sans mélange n’est le partage que des purs esprits ; jusque-là ils ne
jouissent que d’un bonheur incomplet.
75. —
Pouvons-nous comprendre la nature des peines et des jouissances des
esprits en les comparant à celles que nous éprouvons sur la terre ?
« Non, leurs peines et leurs jouissances n’ont rien de charnel. »
Les peines et les jouissances des esprits n’ont rien des
affections corporelles, et pourtant sont mille fois plus vives que celles
que nous éprouvons ici-bas dans le bien comme dans le mal.
76. —
Les esprits des différents ordres sont-ils confondus ? ( † )
« Oui et non ; ils se voient, mais ils se distinguent les uns des autres.
»
76 a. —
Y a-t-il des esprits qui se recherchent et d’autres qui se fuient ?
« Sans doute, selon l’analogie ou l’antipathie de leurs sentiments,
comme cela a lieu parmi vous. »
« Les esprits dégagés de la matière se fuient ou se rapprochent comme
ceux qui sont incarnés. C’est tout un monde dont le vôtre est le
reflet obscurci. »
Bien que les esprits soient partout, les différents ordres
ne sont pas confondus ; ils se voient à distance. Ceux du même rang
se réunissent par une sorte d’affinité, et forment des groupes ou familles
d’esprits unis par la sympathie.
Telle une grande cité où les hommes de tous rangs et de toutes conditions
se voient et se rencontrent sans se confondre ; où les sociétés se forment
par l’analogie des goûts ; où le vice et la vertu se coudoient sans
se rien dire.
77. —
Qu’est-ce qui rapproche les bons esprits ?
« Le désir de faire le bien ; sympathie. Qui se ressemble s’assemble.
»
77 a. —
Quelles sont les occupations des bons esprits ?
« Veiller à l’accomplissement du bien ; s’entretenir sur l’humanité
et sur les améliorations à y apporter. »
77 b. —
Quelle est la nature des relations entre les bons et les mauvais esprits
? ( † )
« Les bons tâchent de combattre les mauvais penchants des autres afin
de les aider à monter ; c’est une mission. »
Les bons esprits se rapprochent par la similitude des jouissances,
la communauté de sentiments et de pensées, et le désir de faire le bien.
Les sentiments d’amour et de bienveillance sont le partage exclusif
des bons esprits. Leur occupation est de veiller à l’accomplissement
de tout de ce qui est bon, et de combattre les penchants des esprits
inférieurs afin de les aider à monter.
C’est ainsi que les bons esprits se font entendre à nous par la voix
de la conscience, à laquelle, trop souvent, nous fermons l’oreille.
78. —
Qu’est-ce qui rapproche les mauvais esprits ?
« Le désir de faire le mal ; honte de leurs fautes et besoin de se trouver
parmi des êtres semblables à eux. »
78 a. —
Pourquoi les esprits inférieurs se plaisent-ils au mal ?
« Par jalousie de n’avoir pas mérité d’être parmi les bons. » ( † )
78 b. —
Les esprits ont-ils des passions spéciales qui n’appartiennent pas à
l’humanité ? ( † )
« Non, autrement ils vous les auraient communiquées. »
78 c. —
Les esprits exercent-ils une influence les uns sur les autres ?
« Oui, les supérieurs sur les inférieurs. »
Les esprits inférieurs se rapprochent par la similitude
des mauvais penchants et le désir de faire le mal.
L’envie, la jalousie, l’orgueil, l’égoïsme et toutes les mauvaises passions
sont le partage des esprits imparfaits, qui se trouvent, par leur infériorité
morale et leur ignorance, sous l’influence des esprits supérieurs. Ils
se plaisent au mal par la jalousie qu’ils ressentent du bonheur des
bons ; leur désir est d’empêcher autant qu’il est en eux les esprits
encore imparfaits d’arriver au bien suprême ; ils veulent faire éprouver
aux autres ce qu’ils éprouvent eux-mêmes.
79. —
Les esprits ont-ils entre eux des affections particulières ? ( † )
« Oui, comme les hommes. »
79 a. –
Ont-ils entre eux des haines ? ( † )
« Oui, les esprits impurs. »
79 b. —
Les affections des esprits sont-elles plus épurées que celles des hommes
?
« Plus l’esprit est parfait, plus l’affection est pure. »
79 c. —
Les affections réciproques des esprits sont-elles susceptibles d’altérations
? ( † )
« Non, car tous les sentiments sont à découvert ; ils ne peuvent
se tromper. »
Outre la similitude de pensées qui unit les esprits du même
ordre, il existe entre eux des affections individuelles fondées sur
des sympathies spéciales. Plus les esprits sont parfaits, plus ces affections
sont pures ; l’amour qui les unit est pour eux la source d’une suprême
félicité. Il n’y a de haine que parmi les esprits impurs.
Les esprits ne pouvant se dissimuler réciproquement leurs pensées, l’hypocrisie
est impossible entre eux ; c’est pourquoi leurs affections sont inaltérables.
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