Le Chemin Écriture du Spiritisme Chrétien.
Doctrine spirite - 1re partie. ©

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Œuvres posthumes — Première Partie.

(Langue portugaise)

Chapitre 16.


LA MORT SPIRITUELLE.

La question de la mort spirituelle est un des principes nouveaux qui marquent les pas du progrès de la science spirite. La manière dont il a été présenté dans certaine théorie individuelle l’a tout d’abord fait rejeter, parce qu’il semblait impliquer à un temps donné, la perte du moi individuel et assimiler les transformations de l’âme à celles de la matière dont les éléments se désagrègent pour former de nouveaux corps. Les êtres heureux et perfectionnés seraient en réalité de nouveaux êtres, ce qui est inadmissible. L’équité des peines et des jouissances futures n’est évidente qu’avec la perpétuité des mêmes êtres gravissant l’échelle du progrès et s’épurant par leur travail et les efforts de leur volonté.

Telles étaient les conséquences que l’on pouvait tirer a priori de cette théorie. Toutefois, nous devons en convenir, elle n’a point été présentée avec la forfanterie d’un orgueilleux venant imposer son système ; l’auteur a dit modestement qu’il venait jeter une idée sur le terrain de la discussion, et que de cette idée pourrait sortir une nouvelle vérité. Selon l’avis de nos éminents guides spirituels, il aurait moins péché par le fond que par la forme qui a prêté à une fausse interprétation ; c’est pourquoi ils nous ont engagé à étudier sérieusement la question ; c’est ce que nous allons essayer de faire en nous basant sur l’observation des faits qui ressortent de la situation de l’Esprit aux deux époques capitales du retour à la vie corporelle et de la rentrée dans la vie spirituelle.

Au moment de la mort corporelle, nous voyons l’Esprit entrer dans le trouble et perdre la conscience de lui-même, de sorte qu’il n’est jamais témoin du dernier soupir de son corps. Peu à peu le trouble se dissipe et l’esprit se reconnaît, comme l’homme qui sort d’un profond sommeil ; sa première sensation est celle de la délivrance de son fardeau charnel ; puis vient le saisissement de la vue du nouveau milieu où il se trouve. Il est dans la situation d’un homme que l’on chloroformise pour lui faire une amputation et que l’on transporte, pendant son sommeil, dans un autre lieu. A son réveil, il se sent débarrassé du membre qui le faisait souffrir ; souvent, il cherche ce membre qu’il est surpris de ne plus sentir ; de même, dans le premier moment, l’Esprit cherche son corps ; il le voit à ses côtés ; il sait que c’est le sien et s’étonne d’en être séparé ; ce n’est que peu à peu qu’il se rend compte de sa nouvelle situation.

Dans ce phénomène, il ne s’est opéré qu’un changement de situation matérielle ; mais, au moral, l’Esprit est exactement ce qu’il était quelques heures auparavant ; il n’a subi aucune modification sensible ; ses facultés, ses idées, ses goûts, ses penchants, son caractère sont les mêmes ; les changements qu’ils peuvent subir ne s’opèrent que graduellement par l’influence de ce qui l’entoure. En résumé, il n’y a eu mort que pour le corps seulement ; pour l’Esprit, il n’y a eu que sommeil.

Dans la réincarnation, les choses se passent tout autrement.

Au moment de la conception du corps destiné à l’Esprit, celui-ci est saisi par un courant fluidique qui, semblable à un lien, l’attire et le rapproche de sa nouvelle demeure. Dès lors, il appartient au corps, comme le corps lui appartient jusqu’à la mort de ce dernier ; toutefois l’union complète, la prise de possession réelle n’a lieu qu’à l’époque de la naissance.

Dès l’instant de la conception, le trouble s’empare de l’Esprit ; ses idées deviennent confuses, ses facultés s’annihilent, le trouble va croissant à mesure que le lien se resserre ; il est complet dans les derniers temps de la gestation ; de sorte que l’Esprit n’est jamais témoin de la naissance de son corps, pas plus qu’il ne l’a été de sa mort ; il n’en a aucune conscience.

A partir du moment où l’enfant respire, le trouble se dissipe peu à peu, les idées reviennent graduellement, mais dans d’autres conditions qu’à la mort du corps.

Dans l’acte de réincarnation, les facultés de l’Esprit ne sont pas simplement engourdies par une sorte de sommeil momentané, comme dans le retour à la vie spirituelle ; toutes, sans exception, passent à l’état latent. La vie corporelle a pour but de les développer par l’exercice, mais toutes ne peuvent l’être simultanément, parce que l’exercice de l’une pourrait nuire au développement de l’autre, tandis que, par le développement successif, elles s’appuient l’une sur l’autre. Il est donc utile que quelques-unes restent en repos, pendant que d’autres grandissent ; c’est pourquoi, dans sa nouvelle existence, l’Esprit peut se présenter sous un aspect tout différent, s’il est plus avancé surtout que dans l’existence précédente.

Dans l’un, la faculté musicale, par exemple, pourra être très active ; il concevra, percevra, et par suite exécutera tout ce qui est nécessaire au développement de cette faculté ; dans une autre existence ce sera le tour de la peinture, des sciences exactes, de la poésie, etc. ; pendant que ces nouvelles facultés s’exercent, celle de la musique restera latente, tout en conservant le progrès accompli ; il en résulte que celui qui a été artiste dans une existence pourra être un savant, un homme d’État, un tacticien dans une autre, tandis qu’il sera nuI sous le rapport artistique, et réciproquement.

L’état latent des facultés dans la réincarnation explique l’oubli des existences précédentes, tandis qu’à la mort du corps, les facultés n’étant qu’à l’état de sommeil de peu de durée, le souvenir de la vie qu’on vient de quitter est complet au réveil.

Les facultés qui se manifestent sont naturellement en rapport avec la position que l’Esprit doit occuper dans le monde, et les épreuves qu’il a choisies ; cependant, il arrive souvent que les préjugés sociaux le déplacent, ce qui fait que certaines gens sont intellectuellement et moralement au-dessus ou au-dessous de la position qu’ils occupent. Ce déclassement, par les entraves qu’il apporte, fait partie des épreuves ; il doit cesser avec le progrès. Dans un ordre social avancé, tout se règle selon la logique des lois naturelles, et celui qui n’est apte qu’à faire des souliers, n’est pas, par droit de naissance, appelé à gouverner les peuples.

Revenons à l’enfant. Jusqu’à la naissance, toutes les facultés étant à l’état latent, l’Esprit n’a aucune conscience de lui-même. Au moment de la naissance celles qui doivent s’exercer ne prennent point subitement leur essor ; leur développement suit celui des organes qui doivent servir à leur manifestation ; par leur activité intime, elles poussent au développement de l’organe correspondant, comme le bourgeon naissant pousse l’écorce de l’arbre. Il en résulte que, dans la première enfance, l’Esprit n’a la jouissance de la plénitude d’aucune de ses facultés, non seulement comme incarné, mais même comme Esprit ; il est véritablement enfant, comme le corps auquel il est lié. Il ne se trouve pas comprimé péniblement dans le corps imparfait, sans cela Dieu eût fait de l’incarnation un supplice pour tous les Esprits bons ou mauvais. Il en est autrement de l’idiot et du crétin ; les organes ne s’étant pas développés parallèlement avec les facultés, l’Esprit finit par se trouver dans la position d’un homme serré par des liens qui lui ôtent la liberté de ses mouvements. Telle est la raison pour laquelle on peut évoquer l’esprit d’un idiot et en obtenir des réponses sensées, tandis que celui d’un enfant en très bas âge ou qui n’a pas encore vu le jour est incapable de répondre.

Toutes les facultés, toutes les aptitudes, sont en germe dans l’Esprit dès sa création ; elles y sont à l’état rudimentaire comme tous les organes dans le premier filet du foetus informe, comme toutes les parties de l’arbre dans la semence. Le sauvage qui, plus tard, deviendra un homme civilisé, possède donc en lui les germes qui, un jour, en feront un savant, un grand artiste ou un grand philosophe.

A mesure que ces germes arrivent à maturité, la Providence lui donne, pour la vie terrestre, un corps approprié à ses nouvelles aptitudes ; c’est ainsi que le cerveau d’un Européen est plus complètement organisé, pourvu d’un plus grand nombre de touches, que celui du sauvage. Pour la vie spirituelle, elle lui donne un corps fluidique ou périsprit plus subtil, impressionnable à de nouvelles sensations. A mesure que l’Esprit grandit, la nature le pourvoit des instruments qui lui sont nécessaires.

Dans le sens de désorganisation, de désagrégation des parties, de dispersion des éléments, il n’y a de mort que pour l’enveloppe matérielle et l’enveloppe fluidique, mais l’âme ou Esprit ne peut mourir pour progresser ; autrement elle perdrait son individualité, ce qui équivaudrait au néant. Dans le sens de transformation, régénération, on peut dire que l’Esprit meurt à chaque incarnation pour ressusciter avec de nouveaux attributs, sans cesser d’être lui-même. Tel un paysan, par exemple, qui s’enrichit et devient grand seigneur ; il a quitté la chaumière pour un palais, la veste pour l’habit brodé ; tout est changé dans ses habitudes, dans ses goûts, dans son langage, dans son caractère même ; en un mot, le paysan est mort, il a enterré l’habit de bure pour renaître homme du monde, et pourtant c’est toujours le même individu, mais transformé.

Chaque existence corporelle est donc pour l’Esprit une occasion de progrès plus ou moins sensible. Rentré dans le monde des Esprits, il y apporte de nouvelles idées ; son horizon moral s’est élargi ; ses perceptions sont plus fines, plus délicates, il voit et comprend ce qu’il ne voyait et ne comprenait pas auparavant ; sa vue qui, dans le principe, ne s’étendait pas au-delà de sa dernière existence, embrasse successivement ses existences passées, comme l’homme qui s’élève et pour qui le brouillard se dissipe, embrasse successivement un plus vaste horizon. A chaque nouvelle station dans l’erraticité, se déroulent à ses yeux de nouvelles merveilles du monde invisible, parce qu’à chacune un voile se déchire. En même temps, son enveloppe fluidique s’épure ; elle devient plus légère, plus brillante ; plus tard, elle serait resplendissante. C’est un esprit presque nouveau ; c’est le paysan dégrossi et transformé ; le vieil Esprit est mort, et cependant c’est toujours le même Esprit.

C’est ainsi, croyons-nous, qu’il convient d’entendre la mort spirituelle.


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