M’accorderez-vous bien l’hospitalité pour votre première séance de 1866 ? Je désire, avec l’accolade fraternelle, vous présenter des vœux amis ; puissiez-vous avoir beaucoup de satisfactions morales, beaucoup de volonté et de charité persévérante.
Dans ce siècle de lumière, ce qui manque le plus, c’est la clarté ! Les demi-savants, les Croquemitaines de la presse, ont vaillamment fait le travail de l’araignée pour obscurcir, à l’aide d’un tissu soi-disant libéral, tout ce qui est clair, tout ce qui éclaire.
Chers Spirites, avez-vous trouvé dans toutes les couches sociales cette force de raisonnement qui est la marque intelligente des êtres arrivés ?
N’avez-vous pas, au contraire, la certitude que la grande majorité de vos frères croupit dans une ignorance malsaine ? Partout les hérésies et les mauvaises actions ! Les bonnes intentions, viciées en leur principe, tombent une à une, semblables à ces beaux fruits dont un ver ronge le cœur et que le vent jette à terre. La clarté, dans les arguments, dans le savoir, aurait-elle fait par hasard élection de domicile dans les académies, chez les philosophes, les journalistes ou les pamphlétaires ?… On pourrait en douter, ce me semble, en les voyant, à l’instar de Diogène, la lanterne à la main, chercher une vérité en plein soleil.
Lumière, clarté, vous êtes l’essence de tout mouvement intelligent !
Bientôt vous inonderez de vos rayons bienfaisants les recoins les plus obscurs de cette pauvre humanité ; c’est vous qui sortirez de la fange tant de terriens ahuris, abrutis, esprits malheureux qui doivent être lavés par l’instruction, par la liberté, surtout par la conscience de leur valeur spirituelle. La lumière chassera les larmes, les peines, les sombres désespoirs, la négation des choses divines, toutes les mauvaises volontés ! En assiégeant le matérialisme, elle le forcera à ne plus s’abriter derrière ce rempart factice, vermoulu, d’où il décoche maladroitement ses traits sur tout ce qui n’est pas son œuvre.
Mais les masques seront arrachés et nous saurons alors si les jouissances, la fortune et le sensualisme, sont bien les emblèmes de la vie et de la liberté. La clarté est utile en tout et à tous ; à l’embryon comme à l’homme, il faut la lumière ! sans elle tout marche à tâtons, et l’âme, à tâtons, cherche l’âme.
Qu’une nuit éternelle se fasse ! aussitôt les couleurs harmonieuses disparaîtront de votre globe, les fleurs s’étioleront, les grands arbres seront détruits ; les insectes, la nature entière ne donneront plus ces mille bruits, l’éternelle chanson à Dieu ! les ruisseaux baigneront des rives désolées ; le froid aura tout momifié, la vie aura disparu !…
Il en est de même pour l’Esprit. Si vous faites la nuit autour de lui, il en sera malade ; le froid pétrifiera ses tendances divines ; l’homme, comme au moyen âge, s’engourdira, semblable en son âme aux solitudes sauvages et désolées des contrées boréales !
C’est pour cela, Spirites, que vous vous devez à toutes les clartés. Mais avant de conseiller et enseigner, commencez d’abord par éclairer les moindres replis de votre âme. Lorsque, assez épurés pour ne rien craindre, vous pourrez élever la voix, le regard, le geste, vous ferez une guerre implacable à l’ombre, à la tristesse, à l’absence de vie ; vous apprendrez les grandes lois spirites aux frères qui ne savent rien du rôle que Dieu leur assigne.
1866, puisses-tu, pour les années à venir, être cette étoile lumineuse qui conduisait les rois mages vers la crèche d’un humble enfant du peuple ; ils venaient rendre hommage à l’incarnation qui devait représenter dans le sens le plus large l’esprit de vérité, cette lumière bienfaisante qui a transformé l’humanité. Par cet enfant, tout a été compris ! C’est bien lui qui éternise la grâce et la simplicité, la charité, la bienveillance, l’amour et la liberté.
Le Spiritisme, étoile lumineuse aussi, doit, comme celle qui a déchiré, il y a dix-huit siècles, le voile sombre des siècles de fer, conduire les terriens à la conquête des vérités promises. Saura-t-il bien se dégager des orages que nous promettent les évolutions humaines et les résistances désespérées de la science aux abois ? C’est ce que vous tous, mes amis, et nous vos frères de l’erraticité, sommes appelés à mieux accuser, en inondant cette année des clartés acquises.
Travailler dans ce but, c’est être adeptes de l’Enfant de Bethléem, c’est être fils de Dieu, de qui émanent toute lumière et toute clarté.
Sonnez.