Le Chemin Écriture du Spiritisme Chrétien.
Doctrine spirite - 1re partie. ©

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Revue spirite — Année IX — Mars 1866.

(Langue portugaise)

INTRODUCTION À L’ÉTUDE DES FLUIDES SPIRITUELS.

I. Du méthode.II. De l’investigation. — III. Des principes. — IV. Du monde spirituel ou des Esprits et sa interaction avec le monde corporel. De l’âme. — V. Du périsprit. — VI. De la liaison de ces deux états : corporel et spirituel. — VII. Du fluide universel. — VIII. Des transformations possibles du périsprit. — IX. De la matérialité du périsprit. — X. Des états du fluide universel.


I.


[DU MÉTHODE.]


Les fluides spirituels jouent un rôle important dans tous les phénomènes spirites, ou mieux, ils sont le principe même de ces phénomènes. Jusqu’à présent on s’est borné à dire que tel effet est le résultat d’une action fluidique ; mais cette donnée générale, suffisante au début, ne l’est plus lorsqu’on veut scruter les détails. Les Esprits ont sagement borné leur enseignement dans le principe ; plus tard ils ont appelé l’attention sur cette grave question des fluides, et ce n’est pas dans un seul centre qu’ils l’ont abordée, c’est à peu près partout.

Mais les Esprits ne viennent pas nous apporter cette science, plus qu’une autre, toute faite ; ils nous mettent sur la voie, nous fournissent les matériaux, c’est à nous de les étudier, de les observer, de les analyser, de les coordonner et de les mettre en œuvre. C’est ce qu’ils ont fait pour la constitution de la doctrine, et ils ont agi de même à l’égard des fluides. Dans mille endroits divers, à notre connaissance, ils en ont ébauché l’étude ; partout nous trouvons quelques faits, quelques explications, une théorie partielle, une idée, mais nulle part un travail d’ensemble complet. Pourquoi cela ? est-ce impuissance de leur part ? Non, certes, car ce qu’ils eussent pu faire comme hommes, ils le peuvent à plus forte raison comme Esprits ; mais c’est, comme nous l’avons dit, qu’ils ne viennent, pour aucune chose, nous affranchir du travail de l’intelligence, sans lequel nos forces, restées inactives, s’étioleraient, car nous trouverions commode qu’ils travaillassent pour nous.

Le travail est donc laissé à l’homme, mais son intelligence, sa vie, son temps, étant bornés, il n’est donné à aucun d’élaborer tout ce qui est nécessaire pour la constitution d’une science ; c’est pourquoi il n’en est pas une seule qui soit, de toutes pièces, l’œuvre d’un seul homme, pas une découverte que son premier inventeur ait portée à la perfection ; à chaque édifice intellectuel, plusieurs hommes et plusieurs générations ont apporté leur contingent de recherches et d’observations.

Ainsi en est-il de la question qui nous occupe, dont les diverses parties ont été traitées séparément, puis colligées en un corps méthodique, lorsque des matériaux suffisants ont pu être réunis. Cette partie de la science spirite se trouve dès lors être, non plus une conception systématique individuelle, d’un homme ou d’un Esprit, mais le produit d’observations multiples, qui tirent leur autorité de la concordance qui existe entre elles.

Par le motif que nous venons d’exprimer, nous ne saurions prétendre que ce soit là le dernier mot. Les Esprits, comme nous l’avons dit, graduent leurs enseignements et les proportionnent à la somme et à la maturité des idées acquises. Il ne saurait donc être douteux que, plus tard, ils mettront sur la voie de nouvelles observations ; mais dès aujourd’hui il y a des éléments suffisants pour former un corps qui sera ultérieurement et graduellement complété.

L’enchaînement des faits nous oblige à prendre notre point de départ de plus haut, afin de procéder du connu à l’inconnu.


II.


[DE L’INVESTIGATION.]


Tout se lie dans l’œuvre de la création. Jadis on considérait les trois règnes comme entièrement indépendants l’un de l’autre, et l’on eût ri de celui qui aurait prétendu trouver une corrélation entre le minéral et le végétal, entre le végétal et l’animal. Une observation attentive a fait disparaître la solution de continuité, et prouvé que tous les corps forment une chaîne non interrompue ; de telle sorte, que les trois règnes ne subsistent, en réalité, que pour les caractères généraux les plus tranchés ; mais sur leurs limites respectives ils se confondent, au point que l’on hésite à savoir où l’un finit et où l’autre commence, et dans lequel certains êtres doivent être rangés ; tels sont, par exemple, les zoophytes  †  ou animaux plantes, ainsi nommés, parce qu’ils tiennent à la fois de l’animal et de la plante.

La même chose a lieu pour ce qui concerne la composition des corps. Longtemps les quatre éléments ont servi de base aux sciences naturelles ; ils sont tombés devant les découvertes de la chimie moderne, qui a reconnu un nombre indéterminé de corps simples. La chimie nous montre tous les corps de la nature formés de ces éléments combinés en diverses proportions ; c’est de la variété infinie de ces combinaisons que naissent les innombrables propriétés des différents corps. C’est ainsi, par exemple, qu’une molécule de gaz oxygène et deux de gaz hydrogène, combinées, forment de l’eau. Dans leur transformation en eau, l’oxygène et l’hydrogène perdent leurs qualités propres ; il n’y a plus, à proprement parler, d’oxygène et d’hydrogène, mais de l’eau. En décomposant l’eau, on retrouve les deux gaz dans les mêmes proportions. Si, au lieu d’une molécule d’oxygène, il y en a deux, c’est-à-dire deux de chaque gaz, ce n’est plus de l’eau, mais un liquide très corrosif. Il a donc suffi d’un simple changement dans la proportion de l’un des éléments pour transformer une substance salutaire en une substance vénéneuse. Par une opération inverse, que les éléments d’une substance délétère, de l’arsenic, par exemple, soient simplement combinés dans d’autres proportions, sans addition ni retranchement d’aucune autre substance, elle deviendra inoffensive, ou même salutaire. Il y a plus : plusieurs molécules réunies, d’un même élément, jouiront de propriétés différentes, selon le mode d’agrégation et les conditions du milieu où elles se trouvent. L’ozone, récemment découvert dans l’air atmosphérique, en est un exemple. On a reconnu que cette substance n’est autre que l’oxygène, un des principes constituants de l’air, dans un état particulier qui lui donne des propriétés distinctes de l’oxygène proprement dit. L’air n’en est pas moins toujours formé d’oxygène et d’azote, mais ses qualités varient selon qu’il contient une quantité plus ou moins grande d’oxygène à l’état d’ozone.

Ces observations, qui paraissent étrangères à notre sujet, s’y rattachent néanmoins d’une manière directe, comme on le verra plus tard ; elles sont, en outre, essentielles comme points de comparaison.

Ces compositions et ces décompositions s’obtiennent artificiellement et en petit dans les laboratoires, mais elles s’opèrent en grand et spontanément dans le grand laboratoire de la nature. Sous l’influence de la chaleur, de la lumière, de l’électricité, de l’humidité, un corps se décompose, ses éléments se séparent, d’autres combinaisons s’opèrent, et de nouveaux corps se forment. Ainsi, la même molécule d’oxygène, par exemple, qui fait partie de notre propre corps, après la destruction de celui-ci, entre dans la composition d’un minéral, d’une plante, ou d’un corps animé. Dans notre corps actuel se trouvent donc les mêmes parcelles de matière qui ont été parties constituantes d’une multitude d’autres corps.

Citons un exemple pour rendre la chose plus claire.

Une petite graine est mise en terre, elle pousse, croît et devient un grand arbre, qui, chaque année donne des feuilles, des fleurs et des fruits. Est-ce à dire que cet arbre tout entier se trouvait dans la graine ? Assurément non, car il contient une quantité de matière de beaucoup plus considérable. D’où lui est donc venue cette matière ? Des liquides, des sels, des gaz que la plante a puisés dans la terre et dans l’air, qui se sont infiltrés dans sa tige, et en ont, petit à petit, augmenté le volume. Mais ni dans la terre ni dans l’air on ne trouve du bois, des feuilles, des fleurs et des fruits. C’est que ces mêmes liquides, sels et gaz, dans l’acte d’absorption, se sont décomposés ; leurs éléments ont subi de nouvelles combinaisons qui les ont transformés en sève, bois, écorce, feuilles, fleurs, fruits, essences volatiles odorantes, etc. Ces mêmes parties vont à leur tour se détruire, se décomposer ; leurs éléments, se mêler de nouveau à la terre et à l’air ; recomposer les substances nécessaires à la fructification ; être réabsorbés, décomposés et transformés une autre fois en sève, bois, écorce, etc. En un mot, la matière n’éprouve ni augmentation, ni diminution, elle se transforme, et, par suite de ces transformations successives, la proportion des diverses substances est toujours en quantité suffisante pour les besoins de la nature. Supposons, par exemple, qu’une quantité donnée d’eau soit décomposée, dans le phénomène de la végétation, pour fournir l’oxygène et l’hydrogène nécessaires à la formation des diverses parties de la plante ; c’est une quantité d’eau qui existe en moins dans la masse ; mais ces parties de la plante, lors de leur décomposition, vont rendre libres l’oxygène et l’hydrogène qu’elles renfermaient, et ces gaz, se combinant entre eux, vont reformer une quantité d’eau équivalente à celle qui avait disparu.

Un fait qu’il n’est pas inopportun de signaler ici, c’est que l’homme, qui peut opérer artificiellement les compositions et les décompositions qui s’opèrent spontanément dans la nature, est impuissant à reconstituer le moindre corps organisé, fût-ce même un brin d’herbe ou une feuille morte. Après avoir décomposé un minéral, il peut le reformer de toutes pièces, tel qu’il était auparavant ; mais lorsqu’il a séparé les éléments d’une parcelle de matière végétale ou animale, il ne peut la reconstituer, à moins forte raison lui donner la vie. Sa puissance s’arrête à la matière inerte : le principe de vie est dans la main de Dieu.

La plupart des corps simples sont appelés pondérables, parce qu’on en peut mesurer le poids, et ce poids est en raison de la somme des molécules contenues dans un volume donné. D’autres sont dits impondérables, parce qu’ils n’ont aucun poids pour nous, et qu’en quelque quantité qu’ils soient accumulés dans un autre corps, ils n’en augmentent pas le poids. Ce sont : le calorique, la lumière, l’électricité, le fluide magnétique ou de l’aimant ; ce dernier n’est qu’une variété de l’électricité. Quoique impondérables, ces fluides n’en ont pas moins une très grande puissance. Le calorique divise les corps les plus durs, les réduit en vapeurs, et donne aux liquides évaporés une force d’expansion irrésistible. Le choc électrique brise les arbres et les pierres, courbe des barres de fer, fond les métaux, transporte au loin des masses énormes. Le magnétisme donne au fer une puissance d’attraction capable de soutenir des poids considérables. La lumière ne possède pas ce genre de force, mais elle exerce une action chimique sur la plupart des corps, et sous son influence s’opèrent incessamment des compositions et des décompositions. Sans la lumière, les végétaux et les animaux s’étiolent, les fruits n’ont ni saveur ni coloration.


III.


[DES PRINCIPES.]


Tous les corps de la nature, minéraux, végétaux, animaux, animés ou inanimés, solide, liquides ou gazeux, sont donc formés des mêmes éléments, combinés de manière à produire l’infinie variété des différents corps. La science va plus loin aujourd’hui ; ses investigations la conduisent peu à peu à la grande loi de l’unité. Il est maintenant à peu près généralement admis que les corps réputés simples ne sont que des modifications, des transformations d’un élément unique, principe universel désigné sous les noms d’éther, fluide cosmique ou fluide universel ; de telle sorte que, selon le mode d’agrégation des molécules de ce fluide, et sous l’influence de circonstances particulières, il acquiert des propriétés spéciales qui constituent les corps simples ; ces corps simples, combinés entre eux en diverses proportions, forment, comme nous l’avons dit, l’innombrable variété des corps composés. Selon cette opinion, le calorique, la lumière, l’électricité et le magnétisme ne seraient également que des modifications du fluide primitif universel. Ainsi ce fluide qui, selon toute probabilité, est impondérable, serait à la fois le principe des fluides impondérables et des corps pondérables.

La chimie nous fait pénétrer dans la constitution intime des corps ; mais, expérimentalement parlant, elle ne va pas au delà des corps considérés comme simples ; ses moyens d’analyse sont impuissants pour isoler l’élément primitif et en déterminer l’essence. Or, entre cet élément dans sa pureté absolue et le point où s’arrêtent les investigations de la science, l’intervalle est immense. En raisonnant par analogie, on arrive à cette conclusion qu’entre ces deux points extrêmes, ce fluide doit subir des modifications qui échappent à nos instruments et à nos sens matériels. C’est dans ce champ nouveau, jusqu’ici fermé à l’exploration, que nous allons essayer de pénétrer.


IV.


[DU MONDE SPIRITUEL OU DES ESPRITS.]

ET SA INTERACTION AVEC LE MONDE CORPOREL. — DE L’ÂME.

Jusqu’à ce jour on n’avait que des idées très incomplètes sur le monde spirituel ou invisible ; on se figurait les Esprits comme des êtres en dehors de l’humanité ; les anges étaient aussi des créatures à part, d’une nature plus parfaite. Quant à l’état des âmes après la mort, les connaissances n’étaient guère plus positives. L’opinion la plus générale en faisait des êtres abstraits, dispersés dans l’immensité, et n’ayant plus de rapports avec les vivants, soit qu’ils fussent, selon la doctrine de l’Église, dans les béatitudes du ciel ou dans les ténèbres de l’enfer. De plus, les observations de la science s’arrêtant à la matière tangible, il en résultait, entre le monde corporel et le monde spirituel, un abîme qui semblait exclure tout rapprochement. C’est cet abîme que de nouvelles observations et l’étude de phénomènes encore peu connus viennent combler, du moins en partie.

Le Spiritisme nous apprend d’abord que les Esprits sont les âmes des hommes qui ont vécu sur la terre ; qu’ils progressent sans cesse, et que les anges sont ces mêmes âmes ou Esprits arrivés à un état de perfection qui les rapproche de la Divinité.

En second lieu, il nous apprend que les âmes passent alternativement de l’état d’incarnation à celui d’erraticité ; qu’à ce dernier état elles constituent la population invisible du globe, auquel elles restent attachées jusqu’à ce qu’elles y aient acquis le développement intellectuel et moral que comporte la nature de ce globe, après quoi elles le quittent pour passer dans un monde plus avancé.

Par la mort du corps, l’humanité corporelle fournit des âmes ou Esprits au monde spirituel ; par les naissances, le monde spirituel alimente le monde corporel ; il y a donc transmutation ou déversion incessante de l’un dans l’autre. Cette relation constante les rend solidaires, car ce sont les mêmes êtres qui entrent dans notre monde et qui en sortent alternativement. C’est là un premier trait d’union, un point de contact qui diminue déjà la distance qui semblait séparer le monde visible du monde invisible.

La nature intime de l’âme, c’est-à-dire du principe intelligent, source de la pensée, échappe complètement à nos investigations ; mais on sait maintenant que l’âme est revêtue d’une enveloppe ou corps fluidique qui en fait, après la mort du corps matériel, comme auparavant, un être distinct, circonscrit et individuel. L’âme est le principe intelligent considéré isolément ; c’est la force agissante et pensante que nous ne pouvons concevoir isolée de la matière que comme une abstraction. Revêtue de son enveloppe fluidique, ou périsprit, l’âme constitue l’être appelé Esprit, comme lorsqu’elle est revêtue de l’enveloppe corporelle, elle constitue l’homme ; or, bien qu’à l’état d’Esprit elle jouisse de propriétés et de facultés spéciales, elle n’a pas cessé d’appartenir à l’humanité. Les Esprits sont donc des êtres semblables à nous, puisque chacun de nous devient Esprit après la mort de son corps, et que chaque Esprit redevient homme par la naissance.

Cette enveloppe n’est point l’âme, car elle ne pense pas : ce n’est qu’un vêtement ; sans l’âme, le périsprit, de même que le corps, est une matière inerte privée de vie et de sensations. Nous disons matière, parce qu’en effet le périsprit, quoique d’une nature éthérée et subtile, n’en est pas moins de la matière tout aussi bien que les fluides impondérables, et, de plus, matière de même nature et de même origine que la matière tangible la plus grossière, ainsi que nous le verrons tout à l’heure.

L’âme ne revêt pas seulement le périsprit à l’état d’Esprit ; elle est inséparable de cette enveloppe, qui la suit dans l’incarnation comme dans l’erraticité. Dans l’incarnation, c’est le lien qui l’unit à l’enveloppe corporelle, l’intermédiaire à l’aide duquel elle agit sur les organes et perçoit les sensations des choses extérieures. Pendant la vie, le fluide périsprital s’identifie avec le corps, dont il pénètre toutes les parties ; à la mort il s’en dégage ; le corps privé de vie se dissout, mais le périsprit, toujours uni à l’âme, c’est-à-dire au principe vivifiant, ne périt pas ; seulement l’âme, au lieu de deux enveloppes, n’en conserve qu’une : la plus légère, celle qui est le plus en harmonie avec son état spirituel.

Quoique ces principes soient élémentaires pour les Spirites, il était utile de les rappeler pour l’intelligence des explications subséquentes et la liaison des idées.


V.


[DU PÉRISPRIT.]


Quelques personnes ont contesté l’utilité de l’enveloppe périspritale de l’âme, et par suite son existence. L’âme, disent-elles, n’a pas besoin d’intermédiaire pour agir sur le corps ; et une fois séparée du corps, c’est un accessoire superflu.

A cela nous répondons d’abord que le périsprit n’est point une création imaginaire, une hypothèse inventée pour arriver à une solution ; son existence est un fait constaté par l’observation. Quant à son utilité, soit pendant la vie, soit après la mort, il faut bien admettre que, puisqu’il existe, c’est qu’il sert à quelque chose. Ceux qui contestent son utilité sont comme un individu qui, ne comprenant pas les fonctions de certains rouages dans un mécanisme, en conclurait qu’ils ne servent qu’à compliquer la machine sans nécessité. Il ne voit pas que si la moindre pièce était supprimée, tout serait désorganisé. Que de choses, dans le grand mécanisme de la nature, semblent inutiles aux yeux de l’ignorant, et même de certains savants, qui croient de bonne foi que s’ils eussent été chargés de la construction de l’univers, ils l’auraient bien mieux fait !

Le périsprit est un des rouages les plus importants de l’économie ; la science l’a observé dans quelques-uns de ses effets, et on l’a tour à tour désigné sous les noms de fluide vital, fluide ou influx nerveux, fluide magnétique, électricité animale, etc., sans se rendre un compte précis de sa nature et de ses propriétés, et encore moins de son origine. Comme enveloppe de l’Esprit après la mort, il a été soupçonné dès la plus haute antiquité. Toutes les théologies attribuent aux êtres du monde invisible un corps fluidique. Saint Paul dit en termes précis que nous renaissons avec un corps spirituel (1º ép. aux Corinth., ch. xv, v, de 35 à 44 et 50).

Il est de même de toutes les grandes vérités fondées sur les lois de la nature, et dont, à toutes les époques, des hommes de génie ont eu l’intuition. C’est ainsi que, dès avant notre ère, des savants philosophes avaient soupçonné la rondeur de la terre et son mouvement de rotation, ce qui n’ôte rien au mérite de Copernic et de Galilée, en supposant même que ces derniers aient profité des idées de leurs devanciers. Grâce à leurs travaux, ce qui n’était qu’une opinion individuelle, une théorie incomplète et sans preuve, inconnue des masses, est devenu une vérité scientifique, pratique et populaire.

La Doctrine du périsprit est dans le même cas ; le Spiritisme ne l’a point découvert le premier ; mais, de même que Copernic pour le mouvement de la terre, il l’a étudié, démontré, analysé, défini, et en a tiré de féconds résultats. Sans les études modernes plus complètes, cette grande vérité, comme beaucoup d’autres, serait encore à l’état de lettre morte.


VI.


[DE LA LIAISON DE CES DEUX ÉTATS : CORPOREL ET SPIRITUEL.]


Le périsprit est le trait d’union qui relie le monde spirituel au monde corporel. Le Spiritisme nous les montre en relation si intime et si constante, que de l’un à l’autre la transition est presque insensible ; or, de même que, dans la nature, le règne végétal se lie au règne animal par des êtres semi-végétaux et semi-animaux, l’état corporel se lie à l’état spirituel non seulement par le principe intelligent, qui est le même, mais encore par l’enveloppe fluidique, à la fois semi-matérielle et semi-spirituelle, de ce même principe. Pendant la vie terrestre, l’être corporel et l’être spirituel sont confondus et agissent de concert ; la mort du corps ne fait que les séparer. La liaison de ces deux états est telle, et ils réagissent l’un sur l’autre avec tant de force, qu’un jour viendra où l’on reconnaîtra que l’étude de l’histoire naturelle de l’homme ne saurait être complète sans l’étude de l’enveloppe périspritale, c’est-à-dire sans mettre un pied dans le domaine du monde invisible.

Ce rapprochement est encore plus grand quand on observe l’origine, la nature, la formation et les propriétés du périsprit, observation qui découle naturellement de l’étude des fluides.


VII.


[DU FLUIDE UNIVERSEL.]


Il est reconnu que toutes les matières animales ont pour principes constituants l’oxygène, l’hydrogène, l’azote et le carbone, combinés en différentes proportions. Or, comme nous l’avons dit, ces corps simples ont eux-mêmes un principe unique, qui est le fluide cosmique universel ; par leurs diverses combinaisons ils forment toutes les variétés de substances qui composent le corps humain, le seul dont nous parlons ici, quoiqu’il en soit de même à l’égard des animaux et des plantes. Il en résulte que le corps humain n’est, en réalité, qu’une sorte de concentration, de condensation ou, si l’on veut, de solidification de fluide universel, comme le diamant est une solidification de gaz carbonique. En effet, supposons la désagrégation complète de toutes les molécules du corps, nous retrouvons l’oxygène, l’hydrogène, l’azote et le carbone, en d’autres termes, le corps sera volatilisé. Ces quatre éléments ramenés à leur état primitif par une nouvelle et plus complète décomposition, si nos moyens d’analyse le permettaient, donneraient le fluide cosmique. Ce fluide, étant le principe de toute matière, est lui-même de la matière, bien que dans un état complet d’éthérisation.

Un phénomène analogue se passe dans la formation du corps fluidique, ou périsprit : c’est également une condensation du fluide cosmique autour du foyer d’intelligence, ou âme. Mais ici la transformation moléculaire s’opère différemment, car le fluide conserve son impondérabilité et ses qualités éthérées. Le corps périsprital et le corps humain ont donc leur source dans le même fluide ; l’un et l’autre sont de la matière, quoique sous deux états différents. Nous avons donc eu raison de dire que le périsprit est de même nature et de même origine que la matière la plus grossière. [item 4] Il n’a, comme on le voit, rien de surnaturel, puisqu’il se lie par son principe aux choses de la nature, dont il n’est qu’une variété.

Le fluide universel étant le principe de tous les corps de la nature, animés et inanimés, et par conséquent de la terre, des pierres, Moïse était dans le vrai quand il dit : « Dieu forma le corps de l’homme du limon de la terre. »  ( † ) Ce qui ne veut point dire que Dieu prit de la terre, la pétrit et en façonna le corps de l’homme, comme on façonne une statue avec de la terre glaise, ainsi que l’ont cru ceux qui prennent les paroles bibliques à la lettre, mais que le corps était formé des mêmes principes ou éléments que le limon de la terre, ou qui avaient servi à former le limon de la terre.

Moïse ajoute : « Et il lui donna une âme vivante, faite à sa ressemblance. »  ( † ) Il fait ainsi une distinction entre l’âme et le corps ; il indique qu’elle est d’une nature différente, qu’elle n’est point matière, mais spirituelle et immatérielle comme Dieu. Il dit : une âme vivante, pour spécifier qu’en elle seule est le principe de vie, tandis que le corps, formé de matière, par lui-même ne vit pas. Ces mots : à sa ressemblance, impliquent une similitude et non une identité. Si Moïse eût regardé l’âme comme une portion de la Divinité, il aurait dit : Dieu l’anima en lui donnant une âme tirée de sa propre substance, comme il dit que le corps était tiré de la terre.

Ces réflexions sont une réponse aux personnes qui accusent le Spiritisme de matérialiser l’âme, parce qu’il lui donne une enveloppe semi-matérielle.


VIII.


[DES TRANSFORMATIONS POSSIBLES DU PÉRISPRIT.]


Dans l’état normal, le périsprit est invisible pour nos yeux, et impalpable pour notre toucher, comme le sont une infinité de fluides et de gaz. Cependant l’invisibilité, l’impalpabilité, et même l’impondérabilité du fluide périsprital ne sont pas absolues ; c’est pourquoi nous disons dans l’état normal. Il subit, dans certains cas, soit peut-être une condensation plus grande, soit une modification moléculaire d’une nature spéciale qui le rend momentanément visible ou tangible : c’est ainsi que se produisent les apparitions. Sans qu’il y ait apparition, beaucoup de personnes ressentent l’impression fluidique des Esprits par la sensation du toucher, ce qui est l’indice d’une nature matérielle.

De quelque manière que s’opère la modification atomique du fluide, il n’y a pas cohésion comme dans les corps matériels ; l’apparence se forme instantanément et se dissipe de même, ce qui explique les apparitions et les disparitions subites. Les apparitions, étant le produit d’un fluide matériel invisible, rendu visible par suite d’un changement momentané dans sa constitution moléculaire, ne sont pas plus surnaturelles que les vapeurs rendues alternativement visibles ou invisibles par la condensation ou la raréfaction. Nous citons la vapeur comme point de comparaison, sans prétendre qu’il y ait similitude de cause et d’effet.


IX.


[DE LA MATÉRIALITÉ DU PÉRISPRIT.]


Quelques personnes ont critiqué la qualification de semi-matérielle donnée au périsprit, en disant qu’une chose est matière ou ne l’est pas. En admettant que l’expression soit impropre, il faudrait s’en prendre à l’absence d’un terme spécial pour exprimer cet état particulier de la matière. S’il en existe un mieux approprié à la chose, les critiques auraient dû l’indiquer. Le périsprit est matière, ainsi que nous venons de le voir, philosophiquement parlant, et par son essence intime ; personne ne saurait le contester ; mais il n’a pas les propriétés de la matière tangible, telle qu’on la conçoit vulgairement ; il ne peut être soumis à l’analyse chimique ; car, bien qu’il ait le même principe que la chair et le marbre, et qu’il puisse en prendre les apparences, ce n’est, en réalité, ni de la chair ni du marbre. Par sa nature éthérée, il tient à la fois de la matérialité par sa substance, et de la spiritualité par son impalpabilité, et le mot semi-matériel n’est pas plus ridicule que celui de semi-double, et tant d’autres, car on peut dire aussi qu’une chose est double ou ne l’est pas.


X.


[DES ÉTATS DU FLUIDE UNIVERSEL.]


Le fluide cosmique, en tant que principe élémentaire universel, offre deux états distincts : celui d’éthérisation ou d’impondérabilité, que l’on peut considérer comme l’état normal primitif, et celui de matérialisation ou de pondérabilité, qui n’est en quelque sorte que consécutif. Le point intermédiaire est celui de la transformation du fluide en matière tangible ; mais, là encore, il n’y a pas de transition brusque, car on peut considérer nos fluides impondérables comme un terme moyen entre les deux états.

Chacun de ces deux états donne nécessairement lieu à des phénomènes spéciaux ; au second appartiennent ceux du monde visible, et au premier ceux du monde invisible. Les uns, appelés phénomènes matériels, sont du ressort de la science proprement dite ; les autres, qualifiés de phénomènes spirituels, parce qu’ils se lient à l’existence des Esprits, sont dans les attributions du Spiritisme ; mais ils ont entre eux de si nombreux points de contact, qu’ils servent à s’éclairer mutuellement, et que, comme nous l’avons dit, l’étude des uns ne saurait être complète sans l’étude des autres.

C’est à l’explication de ces derniers que conduit l’étude des fluides dont nous ferons ultérieurement le sujet d’un travail spécial.



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