Le Chemin Écriture du Spiritisme Chrétien.
Doctrine spirite - 1re partie. ©

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Revue spirite — Année IX — Août 1866.

(Langue portugaise)

MAHOMET ET L’ISLAMISME.

(2e article. – Voir le nº d’août 1866.)
[Revue de novembre.]

9. — C’est à Médine  †  que Mahomet fit construire la première mosquée, à laquelle il travailla de ses propres mains, et qu’il organisa un culte régulier ; il y prêcha peur la première fois en 623. Toutes les mesures prises par lui témoignaient de sa sollicitude et de sa prévoyance : « Un trait caractéristique à la fois de l’homme et de son temps, dit M. Barthélemy Saint-Hilaire, c’est le choix que Mahomet dut faire de trois poètes de Médine, chargés officiellement de le défendre contre les satires des poètes mecquois. Ce n’était probablement pas que l’amour-propre fût plus excitable en lui qu’il ne convenait, mais chez une nation spirituelle et vive, ces attaques avaient un retentissement analogue à celui que les journaux peuvent avoir de nos jours, et elles étaient fort dangereuses. »


10. — Nous avons dit que Mahomet fut contraint de se faire guerrier ; en effet, il n’avait nullement l’humeur belliqueuse, ainsi qu’il l’avait prouvé par les cinquante premières années de sa vie. Or, deux ans à peine s’étaient écoulés depuis son séjour à Médine, que les Coraychites de la Mecque, coalisés avec les autres tribus hostiles, vinrent assiéger la ville. Mahomet dut se défendre ; dès lors commença pour lui la période guerrière qui dura dix ans, et pendant laquelle il se montra surtout tacticien habile. Chez un peuple dont la guerre était l’état normal, qui ne connaissait de droit que celui de la force, il fallait au chef de la nouvelle religion le prestige de la victoire pour asseoir son autorité, même sur ses partisans. La persuasion avait peu d’empire sur ces populations ignorantes et turbulentes ; une trop grande mansuétude eût été prise pour de la faiblesse. Dans leur pensée, le Dieu fort ne pouvait se manifester que par un homme fort, et le Christ avec son inaltérable douceur, eût échoué dans ces contrées.

Mahomet fut donc guerrier par la force des circonstances, bien plus que par son caractère, et il aura toujours le mérite de n’avoir pas été le provocateur. Une fois la lutte engagée, il lui fallait vaincre ou périr ; à cette condition seule, il pouvait être accepté comme l’envoyé de Dieu ; il fallait que ses ennemis fussent terrassés pour se convaincre de la supériorité de son Dieu sur les idoles qu’ils adoraient. A l’exception d’un des premiers combats où il fut blessé, et les Musulmans défaits, en 625, ses armes furent constamment victorieuses, et, dans l’espace de quelques années, il soumit l’Arabie entière à sa loi. Lorsqu’il vit son autorité assise et l’idolâtrie anéantie, il se rendit triomphalement à la Mecque, après dix ans d’exil, suivi de près de cent mille pèlerins, et y accomplit le célèbre pèlerinage dit d’adieu, dont les Musulmans ont scrupuleusement conservé les rites. Il mourut la même année, deux mois après son retour à Médine, le 8 juin 632, à l’âge de soixante-deux ans.


11. — Il faut juger Mahomet par l’histoire authentique et impartiale, non d’après les légendes ridicules que l’ignorance et le fanatisme ont répandues sur son compte, ou les peintures qu’en ont faites ceux qui avaient intérêt à le discréditer en le présentant comme un ambitieux sanguinaire et cruel. Il ne faut pas non plus le rendre responsable des excès de ses successeurs qui voulurent conquérir le monde à la foi musulmane le sabre à la main. Sans doute, il y a eu de grandes taches dans la dernière période de sa vie ; on peut lui reprocher d’avoir en quelques circonstances abusé du droit du vainqueur, et de n’avoir pas toujours agi avec toute la modération désirable. Cependant, à côté de quelques actes que notre civilisation réprouve, il faut dire, à sa décharge, qu’il s’est montré bien plus souvent humain et clément envers ses ennemis que vindicatif, et qu’il a maintes fois donné les preuves d’une véritable grandeur d’âme. Il faut reconnaître aussi qu’au milieu même de ses succès, et alors qu’il était arrivé au plus haut point de sa gloire, il s’est, jusqu’à son dernier jour, renfermé dans son rôle de prophète, sans jamais usurper une autorité temporelle despotique ; il ne s’est fait ni roi, ni potentat, et jamais, dans la vie privée, il ne s’est souillé d’aucun acte de froide barbarie, ni de basse cupidité ; il a toujours vécu simplement, sans faste et sans luxe, se montrant bon et bienveillant pour tout le monde. Ceci est de l’histoire.

Si l’on se reporte au temps et au milieu où il vivait, si l’on considère surtout les persécutions dont lui et les siens furent l’objet, l’acharnement de ses ennemis, et les actes de barbarie que ceux-ci commirent sur ses partisans, peut-on s’étonner que dans l’enivrement de sa victoire il ait parfois usé de représailles ? Est-on bien venu à lui reprocher d’avoir établi sa religion par le fer, chez un peuple barbare qui le combattait, quand la Bible enregistre, comme des faits glorieux pour la foi, des boucheries d’une atrocité telle qu’on est tenté de les prendre pour des légendes ? Quand, mille ans après lui, dans les contrées civilisées de l’Occident, des chrétiens, qui avaient pour guide la sublime loi du Christ, se ruant sur de paisibles victimes, étouffaient les hérésies par les bûchers, les tortures, les massacres, et dans des flots de sang ?


12. — Si le rôle guerrier de Mahomet fut une nécessité pour lui, et si ce rôle peut l’excuser de certains actes politiques, il n’en est pas de même sous d’autres rapports. Jusqu’à l’âge de cinquante ans, et tant que vécut sa première femme Khadidja, de quinze ans plus âgée que lui, ses mœurs furent irréprochables ; mais de ce moment ses passions ne connurent aucun frein, et c’est incontestablement pour justifier l’abus qu’il en fit, qu’il consacra la polygamie dans sa religion. Ce fut son tort le plus grave, car c’est une barrière qu’il a élevée entre l’islamisme et le monde civilisé ; aussi sa religion n’a-t-elle pu, après douze siècles, franchir les limites de certaines races. C’est aussi le côté par lequel son fondateur se rabaisse le plus à nos yeux ; les hommes de génie perdent toujours de leur prestige quand ils se laissent dominer par la matière ; ils grandissent au contraire d’autant plus qu’ils s’élèvent davantage au-dessus des faiblesses de l’humanité.

Cependant le dérèglement des mœurs était tel à l’époque de Mahomet, qu’une réforme radicale était bien difficile chez des hommes habitués à se livrer à leurs passions avec une brutalité bestiale ; on peut donc dire qu’en réglementant la polygamie, il a mis des bornes au désordre et arrêté des abus bien plus graves ; mais la polygamie n’en restera pas moins le ver rongeur de l’Islamisme, parce qu’elle est contraire aux lois de la nature. Par l’égalité numérique des sexes, la nature elle-même a tracé la limite des unions. En permettant quatre femmes légitimes, Mahomet n’a pas songé que, pour que sa loi devînt celle de l’universalité des hommes, il faudrait que le sexe féminin fût au moins quatre fois plus nombreux que le sexe masculin.


13. — Malgré ses imperfections, l’islamisme n’en a pas moins été un grand bienfait à l’époque où il a paru et pour le pays où il pris naissance, car il a fondé le culte de l’unité de Dieu sur les ruines de l’idolâtrie. C’était la seule religion possible pour ces peuples barbares auxquels il ne fallait pas demander de trop grands sacrifices à leurs idées et à leurs coutumes. Il leur fallait quelque chose de simple comme la nature au milieu de laquelle ils vivaient ; la religion chrétienne avait trop de subtilités métaphysiques ; aussi toutes les tentatives faites pendant cinq siècles pour l’implanter dans ces contrées, avaient complètement échoué ; le judaïsme même, trop ergoteur, y avait fait peu de prosélytes parmi les Arabes, quoique les Juifs proprement dits y fussent assez nombreux. Mahomet, supérieur à ceux de sa race, avait compris les hommes de son temps ; pour les tirer de l’abaissement dans lequel les maintenaient de grossières croyances descendues à un stupide fétichisme, il leur donna une religion appropriée à leurs besoins et à leur caractère. Cette religion était la plus simple de toutes : « Croyance en un Dieu unique, tout-puissant, éternel, infini, présent partout, clément et miséricordieux, créateur des cieux, des anges et de la terre, Père de l’homme, sur lequel il veille et qu’il comble de biens ; rémunérateur et vengeur dans une autre vie, où il nous attend pour nous récompenser ou nous punir selon nos mérites ; voyant nos actions les plus secrètes, et présidant à la destinée entière de ses créatures qu’il n’abandonne pas un seul instant, ni dans ce monde, ni dans l’autre ; soumission la plus humble et confiance absolue en sa volonté sainte : » voilà les dogmes.

Pour le culte, il consiste dans la prière répétée cinq fois par jour, le jeûne et les mortifications du mois de rhamadan, et dans certaines pratiques, dont plusieurs avaient un but hygiénique, mais dont Mahomet fit une obligation religieuse, telles que les ablutions quotidiennes, l’abstention du vin, des liqueurs enivrantes, de la chair de certains animaux, et que les fidèles se font un cas de conscience d’observer dans les plus minutieux détails. Le vendredi fut adopté pour le saint jour de la semaine, et la Mecque indiquée comme le point vers lequel tout Musulman doit se tourner en priant. Le service public dans les mosquées consiste en prières en commun, sermons, lecture et explication du Coran. La circoncision n’a pas été instituée par Mahomet, mais conservée par lui ; elle était pratiquée de temps immémorial chez les Arabes. La défense de reproduire par la peinture ou la sculpture aucun être vivant, hommes et animaux, a été faite en vue de détruire l’idolâtrie, et d’empêcher qu’elle ne se renouvelât. Enfin, le pèlerinage de la Mecque, que tout fidèle doit accomplir au moins une fois dans sa vie, est un acte religieux ; mais il avait un autre but à cette époque, un but politique, celui de rapprocher par un lien fraternel les diverses tribus ennemies, en les réunissant dans un commun sentiment de piété sur un même lieu consacré.


14. — Au point de vue historique, la religion musulmane admet l’Ancien Testament dans son entier jusqu’à Jésus-Christ inclusivement, qu’elle reconnaît comme prophète. Selon Mahomet, Moïse et Jésus étaient des envoyés de Dieu pour enseigner la vérité aux hommes ; l’Évangile, de même que la loi du Sinaï, est la parole de Dieu ; mais les Chrétiens en ont détourné le sens. Il déclare, en termes explicites, qu’il n’apporte ni croyances nouvelles, ni culte nouveau, mais qu’il vient rétablir le culte du Dieu unique professé par Abraham. Il ne parle qu’avec respect des patriarches et des prophètes qui l’ont précédé : Moïse, David, Isaïe, Ézéchiel et Jésus-Christ ; du Pentateuque, des Psaumes et de l’Évangile. Ce sont les livres qui ont devancé et préparé le Coran. Loin de cacher les emprunts qu’il leur fait, il s’en vante, et leur grandeur est le fondement de la sienne. On peut juger de ses sentiments et du caractère de ses instructions par le fragment suivant du dernier discours qu’il prononça à la Mecque lors du pèlerinage d’adieu, peu de temps avant sa mort, et conservé dans l’ouvrage d’Ibn-Ishâc  †  et d’Ibn-Ishâm :  † 


15. —  O peuples ! écoutez mes paroles ; car je ne sais si, une autre année, je pourrai me retrouver encore avec vous dans ce lieu. Soyez humains et justes entre vous. Que la vie et la propriété de chacun soient inviolables et sacrées pour les autres ; que celui qui a reçu un dépôt le rende fidèlement à qui le lui a remis. Vous paraîtrez devant votre Seigneur, et il vous demandera compte de vos actions. Traitez bien les femmes, elles sont vos aides, elles ne peuvent rien par elles seules. Vous les avez prises comme un bien que Dieu vous a confié, et vous avez pris possession d’elles par des paroles divines.

« O peuples ! écoutez mes paroles et fixez-les dans vos esprits. Je vous ai tout révélé ; je vous laisse une loi qui vous préservera à jamais de l’erreur, si vous y restez fidèlement attachés ; une loi claire et positive, le livre de Dieu et l’exemple de son prophète.

« O peuples ! écoutez mes paroles, et fixez-les dans vos esprits. Sachez que tout Musulman est le frère de l’autre ; que tous les Musulmans sont frères entre eux, que vous êtes tous égaux entre vous, et que vous n’êtes qu’une famille de frères. Gardez-vous de l’injustice ; personne ne doit la commettre au détriment de son frère : elle entraînerait votre perte éternelle.

« O Dieu ! ai-je rempli mon message et terminé ma mission ? — La foule qui l’entourait répondit : « Oui, tu l’as accomplie. » Et Mahomet s’écria : O Dieu, daigne recevoir ce témoignage ! »


16. — Voici maintenant le jugement que porte sur Mahomet, et l’influence de sa doctrine, un de ses historiographes, M. G. Weil, dans son ouvrage allemand intitulé : Mohammet der Prophetn pages 400 et suivantes :

« La doctrine de Dieu et des saintes destinées de l’homme, prêchée par Mahomet dans un pays qui était livré à la plus brutale idolâtrie, et qui avait à peine une idée de l’immortalité de l’âme, doit d’autant plus nous réconcilier avec lui, malgré ses faiblesses et ses fautes, que sa vie particulière ne pouvait exercer sur ses adhérents aucune influence fâcheuse. Loin de se donner jamais pour modèle, il voulait toujours qu’on le regardât comme un être privilégié, à qui Dieu permettait de se mettre au-dessus de la loi commune ; et, de fait, on l’a considéré de plus en plus sous ce jour spécial.

« Nous serions injustes et aveugles, si nous ne reconnaissions pas que son peuple lui doit encore autre chose de vrai et de bien. Il a réuni en une seule grande nation, croyant fraternellement à Dieu, les tribus innombrables des Arabes jusque-là ennemies entre elles. A la place du plus violent arbitraire, du droit de la force, et de la lutte individuelle, il a mis un droit inébranlable, qui, malgré ses imperfections, forme toujours la base de toutes les lois de l’Islamisme. Il a limité la vengeance du sang qui, avant lui, s’étendait jusqu’aux parents les plus éloignés, et il l’a bornée à celui-là seul que les juges reconnaissaient pour meurtrier. Il a bien mérité surtout du beau sexe, non-seulement en protégeant les filles contre l’atroce coutume qui les faisait souvent immoler par leurs pères ; mais en outre, en protégeant les femmes contre les parents de leurs maris, qui en héritaient comme d’une chose matérielle, et en les défendant contre les mauvais traitements des hommes. Il a restreint la polygamie, en ne permettant aux croyants que quatre femmes légitimes, au lieu de dix, comme c’était l’usage, surtout à Médine. Sans avoir entièrement émancipé les esclaves, il leur a été bon et utile de bien des manières. Pour les pauvres, il a non-seulement recommandé toujours la bienfaisance à leur égard, mais il a formellement établi un impôt en leur faveur, et il leur n a fait une part spéciale dans le butin et le tribut. En défendant le jeu, le vin et toutes les boissons enivrantes, il a prévenu bien des vices, bien des excès, bien des querelles et bien des désordres.

« Quoique nous ne regardions pas Mahomet comme un vrai prophète, parce qu’il a employé pour propager sa religion des moyens violents et impurs, parce qu’il a été trop faible pour se soumettre lui-même à la loi commune, et parce qu’il s’appelait le sceau des prophètes, tout en déclarant que Dieu pouvait toujours remplacer ce qu’il avait donné par quelque chose de mieux, il a le mérite, néanmoins, d’avoir fait pénétrer les plus belles doctrines de l’Ancien et du Nouveau Testament chez un peuple qui n’était éclairé par aucun rayon de la foi, et il doit à ce titre paraître, même à des yeux non mahométans, comme un envoyé de Dieu. »


17. — Comme complément de cette étude, nous citerons quelques passages textuels du Coran, empruntés à la traduction de Savary :

Au nom du Dieu clément et miséricordieux. — Louange à Dieu, souverain des mondes. — La miséricorde est son partage. — Il est le roi au jour du jugement. — Nous t’adorons, Seigneur, et nous implorons ton assistance. – Dirige-nous dans le sentier du salut, — dans le sentier de ceux que tu as comblés de tes bienfaits ; — de ceux qui n’ont point mérité ta colère et se sont préservés de l’erreur. (Introduction, Sourate i.)

O mortels, adorez le Seigneur qui vous a créés, vous et vos pères, afin que vous le craigniez ; qui vous a donné la terre pour lit, et le ciel pour toit ; qui a fait descendre la pluie des cieux pour produire tous les fruits dont vous vous nourrissez. Ne donnez point d’associé au Très-Haut ; vous le savez. (Sourate ii, v. 19 et 20.)

Pourquoi ne croyez-vous pas à Dieu ? Vous étiez morts, il vous a donné la vie ; il éteindra vos jours, et il en rallumera le flambeau. Vous retourne-rez à lui. — Il créa pour votre refuge tout ce qui est sur la terre. Portant ensuite ses regards vers le firmament, il forma les sept cieux. C’est lui dont la science embrasse l’univers. (Sourate ii, v. 26, 27.)

L’Orient et l’Occident appartiennent à Dieu ; vers quelque lieu que se tournent vos regards, vous rencontrerez sa face. Il remplit l’univers de son immensité et de sa science. — Il a formé la terre et les cieux. Veut-il produire quelque ouvrage ? il dit : « Sois fait ; » et l’ouvrage est fait. — Les ignorants disent : « Si Dieu ne nous parle, ou si tu ne nous fais voir un miracle, nous ne croirons point. » Ainsi parlaient leurs pères ; leurs cœurs sont semblables. Nous avons fait éclater assez de prodiges pour ceux qui ont la foi. (Sourate ii, v. 109 à 112.)

Dieu n’exigera de chacun de nous que suivant ses forces. Chacun aura en sa faveur ses bonnes œuvres, et contre lui le mal qu’il aura fait. Seigneur, ne nous punis pas des fautes commises par oubli. Pardonne-nous nos péchés ; ne nous impose pas le fardeau qu’ont porté nos pères. Ne nous charge pas au-dessus de nos forces. Fais éclater pour tes serviteurs le pardon et l’indulgence. Aie compassion de nous ; tu es notre secours. Aide-nous contre les nations infidèles. (Sourate ii, v. 296.)

O Dieu, roi suprême, tu donnes et tu ôtes à ton gré les couronnes et le pouvoir. Tu élèves et tu abaisses les humains à ta volonté ; le bien est dans tes mains : tu es le Tout-Puissant. — Tu changes le jour en nuit, et la nuit en jour. Tu fais sortir la vie du sein de la mort, et la mort du sein de la vie. Tu verses tes trésors infinis sur ceux qu’il te plaît. (Sourate iii, v. 25 et 26.)

Ignorez-vous combien de peuples nous avons fait disparaître de la face de la terre ? Nous leur avions donné un empire plus stable que le vôtre. Nous envoyions les nuages verser la pluie sur leurs campagnes ; nous y faisions couler des fleuves. Leurs crimes seuls ont causé leur ruine. Nous les avons remplacés par d’autres nations. (Sourate vi, v. 6.)

C’est à Dieu que vous devez le sommeil de la nuit et le réveil du matin. Il sait ce que vous faites pendant le jour. Il vous laisse accomplir la carrière de la vie. Vous reparaîtrez devant lui, et il vous montrera vos œuvres. – Il domine sur ses serviteurs. Il vous donne pour gardiens des anges chargés de terminer vos jours au moment prescrit. Il exécute soigneusement l’ordre du ciel. – Vous retournerez ensuite devant le Dieu de vérité. N’est-ce pas à lui qu’il appartient de juger ? Il est le plus exact des juges. — Qui vous délivre des tribulations de la terre et des mers, lorsque, l’invoquant en public ou dans le secret de vos cœurs, vous vous écriez : « Seigneur, si tu écartes de nous ces maux, nous en serons reconnaissants ? » — C’est Dieu qui vous en délivre. C’est sa bonté qui vous soulage de la peine qui vous oppresse ; et ensuite vous retournez à l’idolâtrie. (Sourate vi, v. 60 à 64.)

Tous les secrets sont dévoilés à ses yeux ; il est grand le Très-Haut. — Celui qui parle dans le secret, celui qui parle en public, celui qui s’enveloppe des ombres de la nuit et celui qui paraît au grand jour, lui sont également connus. – C’est lui qui fait briller la foudre à vos regards pour vous inspirer la crainte et l’espérance. C’est lui qui élève les nuages chargés de pluie. — Le tonnerre célèbre ses louanges. Les anges tremblent en sa présence. Il lance la foudre, et elle frappe les victimes marquées. Les hommes disputent de Dieu, mais il est le fort et le puissant. — Il est l’invocation véritable. Ceux qui implorent d’autres dieux ne seront point exaucés. Ils ressemblent au voyageur qui, pressé par la soif, tend la main vers l’eau qu’il ne peut atteindre. L’invocation des infidèles se perd dans la nuit de l’erreur. (Sourate xiii, v. 10 à 15.)

Ne dis jamais : « Je ferai cela demain, » sans ajouter : « Si c’est la vo-lonté de Dieu. » Elève vers lui ta pensée, lorsque tu as oublié quelque chose, et dis : « Peut-être qu’il m’éclairera et qu’il me fera connaître la vérité. (Sourate xviii, v. 23.)

Si les flots de la mer se changeaient en encre pour décrire les louanges du Seigneur, ils seraient épuisés avant d’avoir célébré toutes ses merveilles. Un autre océan semblable ne suffirait point encore. (Sourate xviii, v. 109.)

Celui qui cherche la vraie grandeur la trouve en Dieu, source de toutes les perfections. Les discours vertueux montent vers son trône. Il exalte les bonnes œuvres ; il punit rigoureusement le scélérat qui trame des perfidies.

Non, le ciel ne révoque jamais l’arrêt qu’il a prononcé. — N’ont-ils pas parcouru la terre ? n’ont-ils pas vu quelle a été la fin déplorable des peuples qui, avant eux, marchèrent dans les voies d’iniquité ? Ces peuples étaient plus forts et plus puissants qu’ils ne sont. Mais rien dans les cieux et sur la terre ne peut s’opposer aux volontés du Très-Haut. La science et la force sont ses attributs. — Si Dieu punissait les hommes dès l’instant qu’ils sont coupables, il ne resterait point sur la terre d’être animé. Il diffère les châtiments jusqu’au terme marqué. — Lorsque le temps est venu, il distingue les actions de ses serviteurs. (Sourate xxxv, v. 11, 41 à 45.)


18. — Ces citations suffisent pour montrer le profond sentiment de piété qui animait Mahomet, et l’idée grande et sublime qu’il se faisait de Dieu. Le Christianisme pourrait revendiquer ce tableau.

Mahomet n’a point enseigné le dogme de la fatalité absolue, ainsi qu’on le croit généralement. Cette croyance, dont sont imbus les musulmans et qui paralyse leur initiative en maintes circonstances, n’est qu’une fausse interprétation et une fausse application du principe de la soumission à la volonté de Dieu poussé hors de ses limites rationnelles ; ils ne comprennent pas que cette soumission n’exclut pas l’exercice des facultés de l’homme, et il leur manque pour correctif la maxime : Aide-toi, le ciel t’aidera.


19. — Les passages suivants ont trait à des points particuliers de doctrine.

Dieu a un fils, disent les Chrétiens. Loin de lui ce blasphème ! Tout ce qui est dans les cieux et sur la terre lui appartient. Tous les êtres obéissent à sa voix. (Sourate ii, v. 110.)

O vous qui avez reçu les Écritures, ne passez pas les bornes de la foi ; ne dites de Dieu que la vérité. Jésus est fils de Marie, l’envoyé du Très-Haut et son Verbe. Il l’a fait descendre dans le sein de Marie ; il est son souffle. Croyez en Dieu et en ses apôtres ; mais ne dites pas qu’il y a une trinité en Dieu. Il est un : cette croyance vous sera plus sûre. Loin qu’il ait un fils, il gouverne seul le ciel et la terre ; il se suffit à lui-même. — Le Messie ne rougira pas d’être le serviteur de Dieu, pas plus que les anges qui entourent son trône et lui obéissent. (Sourate iv, v. 169, 170.)

Ceux qui soutiennent la trinité de Dieu sont blasphémateurs ; il n’y a qu’un seul Dieu. S’ils ne changent de croyance, un supplice douloureux sera le prix de leur impiété. (Sourate v, v. 77.)

Les Juifs disent qu’Ozaï est le fils de Dieu. Les Chrétiens disent la même chose du Messie. Ils parlent comme les infidèles qui les ont précédés. Le ciel punira leurs blasphèmes. — Ils appellent seigneurs leurs pontifes, leurs moines, et le Messie fils de Marie. Mais il leur est recommandé de servir un seul Dieu : Il n’y en a point d’autre. Anathème sur ceux qu’ils associent à son culte. (Sourate ix, v. 30, 31.)

Dieu n’a point de fils ; il ne partage point l’empire avec un autre Dieu. S’il en était ainsi, chacun d’eux voudrait s’approprier sa création et s’élever au-dessus de son rival. Louange au Très-haut ! Loin de lui ces blasphèmes ! (Sourate xxii, v. 93.)

Déclare, ô Mahomet, ce que le ciel t’a révélé. — L’assemblée des génies ayant écouté la lecture du Coran, s’écria : « Voilà une doctrine merveilleuse. — Elle conduit à la vraie foi. Nous croyons en elle, et nous ne donnons pas d’égal à Dieu. — Gloire à sa Majesté suprême ! Dieu n’a point d’épouse ; il n’a point enfanté. » (Sourate lxxii, v. 1 à 4.)

Dites : « Nous croyons en Dieu, au livre qui nous a été envoyé, à ce qui a été révélé à Abraham, Ismaël, Isaac, Jacob et aux douze tribus. Nous croyons à la doctrine de Moïse, de Jésus et des prophètes ; nous ne mettons aucune différence entre eux, et nous sommes musulmans. » (Sourate ii, v. 130.)

Il n’y a de Dieu que le Dieu vivant et éternel. — Il t’a envoyé le livre qui renferme la vérité, pour confirmer la vérité des Écritures qui l’ont précédé. Avant lui, il fit descendre le Pentateuque et l’Évangile pour servir de guides aux hommes ; il a envoyé le Coran des cieux. — Ceux qui nieront la doctrine divine ne doivent s’attendre qu’à des supplices ; Dieu est puissant et la vengeance est dans ses mains. (Sourate iii, v. 1, 2, 3.)

Il en est qui disent : « Nous avons fait serment à Dieu de ne croire à aucun prophète, à moins que l’offrande qu’il présente ne soit confirmée par le feu du ciel. » — Réponds-leur : « Vous aviez des prophètes avant moi ; ils ont opéré des miracles, et celui-là même dont vous parlez. Pourquoi alors avez-vous teint vos mains de leur sang, si vous dites la vérité ? — S’ils nient ta mission, ils ont traité de même les apôtres qui t’ont précédé, quoiqu’ils fussent doués du don des miracles et qu’ils eussent apporté le livre qui éclaire (l’Évangile) et le livre des psaumes. (Sourate iii, v. 179 à 181.)


20. — Nous t’avons inspiré, comme nous avons inspiré Noé, les prophètes, Abraham, Ismaël, Isaac, Jacob, les tribus, Jésus, Job, Jonas, Aaron et Salomon. Nous avons donné les psaumes de David. (Sourate iv, v. 161.)

Dans maints autres endroits, Mahomet parle dans le même sens et avec le même respect des prophètes, de Jésus et de l’Évangile ; mais il est évident qu’il s’est mépris sur le sens attaché à la Trinité, et à la qualité de fils de Dieu qu’il prend à la lettre. Si ce mystère est incompréhensible pour tant de chrétiens, et s’il a soulevé tant de commentaires et de controverses parmi eux, on ne doit pas s’étonner que Mahomet ne l’ait pas compris. Dans les trois personnes de la Trinité il a vu trois dieux, et non un seul Dieu en trois personnes distinctes ; dans le fils de Dieu, il a vu une procréation ; or, l’idée qu’il se faisait de l’Être suprême était si grande, que la moindre parité entre Dieu et un être quelconque, et l’idée qu’il pouvait partager sa puissance, lui semblait un blasphème. Jésus ne s’étant jamais donné comme Dieu, et n’ayant point parlé de la Trinité, ces dogmes lui parurent une dérogation aux paroles mêmes du Christ. Il vit dans Jésus et l’Évan-gile la confirmation du principe de l’unité de Dieu, but qu’il poursuivait lui-même ; c’est pourquoi il les avait en grande estime, tandis qu’il accusait les Chrétiens de s’être écartés de cet enseignement, en fractionnant Dieu et en déifiant son messie. Aussi se dit-il envoyé après Jésus pour ramener les hommes à l’unité pure de la divinité. Toute la partie dogmatique du Coran repose sur ce principe qu’il répète à chaque pas.

L’Islamisme ayant ses racines dans l’ancien et le nouveau Testament, en est une dérivation ; on peut le considérer comme une des nombreuses sectes nées des dissidences qui surgirent dès l’origine du Christianisme touchant la nature du Christ, avec cette différence que l’Islamisme, formé en dehors du Christianisme, a survécu à la plupart de ces sectes, et compte aujourd’hui cent millions de sectateurs.

Mahomet venait combattre à outrance, dans sa propre nation, la croyance en plusieurs dieux, pour y rétablir le culte abandonné du Dieu unique d’Abraham et de Moïse ; l’anathème qu’il a lancé contre les infidèles et les impies avait surtout pour objet la grossière idolâtrie professée par ceux de sa race, mais il frappait par contre-coup les Chrétiens. Telle est la cause du mépris des Musulmans pour tout ce qui porte le nom de chrétien, malgré leur respect pour Jésus et l’Évangile. Ce mépris s’est transformé en haine sous l’influence du fanatisme entretenu et surexcité par leurs prêtres. Disons aussi que, de leur côté, les Chrétiens ne sont pas sans reproches, et qu’ils ont eux-mêmes alimenté cet antagonisme par leurs propres agressions.

Tout en blâmant les Chrétiens, Mahomet n’avait point pour eux des sentiments hostiles, et dans le Coran même il recommande d’user envers eux de ménagements, mais le fanatisme les a englobés dans la proscription générale des idolâtres et des infidèles dont la présence ne doit point souiller les sanctuaires de l’Islamisme, c’est pourquoi l’entrée des mosquées, de la Mecque et des lieux saints leur est interdite. Il en fut de même à l’égard des Juifs, et si Mahomet les a rudement châtiés à Médine, c’est qu’ils s’étaient ligués contre lui. Du reste, nulle part, dans le Coran, on ne trouve l’extermination des Juifs et des Chrétiens érigée en devoir, ainsi qu’on le croit généralement. Il serait donc injuste de lui imputer les maux causés par le zèle inintelligent et les excès de ses successeurs.


21. — Nous t’avons inspiré d’embrasser la religion d’Abraham, qui reconnaît l’unité de Dieu et qui n’adore que sa majesté suprême. — Emploie la voix de la sagesse et la force de la persuasion pour appeler les hommes à Dieu. Combats avec les armes de l’éloquence. Dieu connaît parfaitement ceux qui ont dans l’égarement et ceux qui marchent au flambeau de la foi. (Sourate xvi, v. 124, 126.)

S’ils t’accusent d’imposture, réponds-leur : « J’ai pour moi mes œuvres ; que les vôtres parlent en votre faveur. Vous ne serez point responsables de ce que je fais, et moi, je suis innocent de ce que vous faites. (Sourate x, v. 42.)

Quand s’accompliront tes menaces ? demandent les infidèles. Marque-nous en le terme, si tu es véridique. Réponds-leur : « Les trésors et les vengeances célestes ne sont pont dans mes mains ; Dieu seul en est le dispensateur. Chaque nation a son terme fixé ; elle ne saurait ni le hâter, ni le retarder un instant. » (Sourate x, v. 49, 50.)

Si l’on nie ta doctrine, sache que les prophètes venus avant toi subirent le même sort, quoique les miracles, la tradition et le livre qui éclaire (l’Évangile) attestassent la vérité de leur mission. (Sourate xxxv, v. 23.)

L’aveuglement des infidèles te surprend, et ils rient de ton étonnement. — En vain tu veux les instruire : leur cœur rejette l’instruction. — S’ils voyaient des miracles, ils s’en moqueraient ; — ils les attribueraient à la magie. (Sourate xxxvii, v. 12 à 15.)


Ce ne sont pas là les ordres d’un Dieu sanguinaire qui commande l’extermination. Mahomet ne se fait point l’exécuteur de sa justice ; son rôle est d’instruire ; à Dieu seul appartient de punir ou de récompenser en ce monde et en l’autre. Le dernier paragraphe semble être écrit pour les Spirites de nos jours, tant les hommes sont toujours et partout les mêmes.


Faites la prière, donnez l’aumône ; le bien que vous ferez, vous le trouverez auprès de Dieu, parce qu’il voit vos actions. (Sourate ii, v. 104.)

Il ne suffit pas, pour être justifié, de tourner son visage vers l’orient et l’occident ; il faut en outre croire à Dieu, au jour dernier, aux anges, au Coran, aux prophètes. Il faut pour l’amour de Dieu secourir ses proches, les orphelins, les pauvres, les voyageurs, les captifs et ceux qui demandent. Il faut faire la prière, garder sa promesse, supporter patiemment l’adversité et les maux de la guerre. Tels sont les devoirs des vrais croyants. (Sourate ii, v. 172.)

Une parole honnête et le pardon des offenses sont préférables à l’aumône qu’aurait suivie l’injustice. Dieu est riche et clément. (Sourate ii, v. 265.)

Si votre débiteur a de la peine à vous payer, donnez-lui du temps ; ou, si vous voulez mieux faire, remettez-lui la dette. Si vous saviez ! (Sourate ii, v. 280.)

La vengeance doit être proportionnée à l’injure ; mais l’homme généreux qui pardonne a sa récompense assurée auprès de Dieu, qui hait la violence. (Sourate xlii, v. 38.)

Combattez vos ennemis dans la guerre entreprise pour la religion, mais n’attaquez pas les premiers ; Dieu hait les agresseurs. (Sourate ii, v. 186.)

Certainement les Musulmans, les Juifs, les Chrétiens et les Sabéens, qui croient en Dieu et au jugement dernier, et qui feront le bien, en recevront la récompense de ses mains ; ils seront exempts de la crainte et des supplices. (Sourate v, v. 73.)

Ne faites point violence aux hommes à cause de leur foi. La voie du salut est assez distincte du chemin de l’erreur. Celui qui abjurera le culte des idoles pour la religion sainte aura saisi une colonne inébranlable. Le Seigneur sait et entend tout. (Sourate ii, v. 257.)

Ne disputez avec les Juifs et les Chrétiens qu’en termes honnêtes et modérés. Confondez ceux d’entre eux qui sont impies. Dites : Nous croyons au livre qui nous a été révélé et à vos écritures. Notre Dieu et le vôtre ne font qu’un. Nous sommes musulmans. (Sourate xxix, v. 45.)

Les Chrétiens seront jugés d’après l’Évangile ; ceux qui les jugeront autrement seront prévaricateurs. (Sourate v, v. 51.)

Nous donnâmes le Pentateuque à Moïse. C’est à sa lumière que doit marcher le peuple hébreu. Ne doute pas de rencontrer au ciel le guide des Israélites. (Sourate xxxii, v. 23.)

Si les juifs avaient la foi et la crainte du Seigneur, nous effacerions leurs péchés ; nous les introduirions dans le jardin des délices. L’observation du Pentateuque, de l’Évangile et des préceptes divins leur procurerait la jouissance de tous les biens. Il en est parmi eux qui marchent dans la bonne voie, mais la plupart sont impies. (Sourate v, v. 70.)

Dis aux Juifs et aux Chrétiens : « Terminons nos différends ; n’admettons qu’un Dieu, et ne lui donnons point d’égal ; qu’aucun de nous n’ait d’autre Seigneur que lui. » S’ils refusent d’obéir, dis-leur : « Vous rendrez du moins témoignage que, quant à nous, nous sommes croyants. (Sourate iii, v. 57.)


Voilà certes des maximes de charité et de tolérance qu’on aimerait à voir dans tous les cœurs chrétiens !


Nous t’avons envoyé à un peuple que d’autres peuples ont précédé, afin que tu lui enseignes nos révélations. Ils ne croient point aux miséricordieux. Dis-leur : « Il est mon Seigneur ; il n’y a de Dieu que lui. J’ai mis ma confiance en sa bonté. Je reparaîtrai devant son tribunal. (Sourate xiii, v. 29.)

Nous avons apporté aux hommes un livre où brille la science qui doit éclairer les fidèles et leur procurer la miséricorde divine. – Attendent-ils l’accomplissement du Coran ? Le jour où il sera accompli, ceux qui auront vécu dans l’oubli de ses maximes diront : « Les ministres du Seigneur nous prêchaient la vérité. Où trouverons-nous maintenant des intercesseurs ? Quel espoir avons-nous de retourner sur la terre pour nous corriger ? Ils ont perdu leurs âmes, et leurs illusions se sont évanouies. (Sour. vii, v. 50, 51.)


22. — Le mot reparaître implique l’idée d’avoir déjà paru ; c’est-à-dire d’avoir vécu avant l’existence actuelle. Mahomet l’exprime clairement quand il dit ailleurs : « Vous reparaîtrez devant lui et il vous montrera vos œuvres. Vous retournerez devant le Dieu de vérité. » C’est le fond de la doctrine de la préexistence de l’âme, tandis que, selon l’Église, l’âme est créée à la naissance de chaque corps. La pluralité des existences terrestres n’est point indiquée dans le Coran d’une manière aussi explicite que dans l’Évangile ; cependant l’idée de revivre sur la terre est entrée dans la pensée de Mahomet, puisque tel serait, selon lui, le désir des coupables pour se corriger. Il a donc compris qu’il serait utile de pouvoir recommencer une nouvelle existence.


23. — Quand on leur demande : Croyez-vous à ce que Dieu a envoyé du ciel ? Ils répondent : « Nous croyons aux Écritures que nous avons reçues ; » et ils rejettent le livre véritable, venu depuis, pour mettre le sceau à leurs livres sacrés. Dis-leur : « Pourquoi avez-vous tué les prophètes si vous aviez la foi ? (Sourate ii, v. 85.)

Mahomet n’est le père d’aucun de vous. Il est l’envoyé de Dieu et le sceau des prophètes. La science de Dieu est infinie. (Sourate xxxiii, v. 40.)

En se donnant comme le sceau des prophètes, Mahomet annonce qu’il est le dernier, la conclusion, parce qu’il a dit toute la vérité ; après lui il n’en viendra plus d’autres. C’est là un article de foi chez les Musulmans. Au point de vue inclusivement religieux, il est tombé dans l’erreur de toutes les religions qui se croient inamovibles, même contre le progrès des sciences ; mais pour lui c’était presque une nécessité afin d’affermir l’autorité de sa parole chez un peuple qu’il avait eu tant de peine à convertir à sa foi. Au point de vue social c’était un tort, parce que le Coran étant une législation civile autant que religieuse, il a posé un point d’arrêt au progrès. Telle est la cause qui a rendu et rendra longtemps encore les peuples musulmans stationnaires, et réfractaires aux innovations et aux réformes qui ne sont pas dans le Coran. C’est un exemple de l’inconvénient qu’il y a de confondre ce qui doit être distinct. Mahomet n’a pas tenu compte du progrès humain ; c’est une faute commune à presque tous les réformateurs religieux. D’un autre côté, il avait à réformer non-seulement la foi, mais le caractère, les usages, les habitudes sociales de ses peuples ; il lui fallait appuyer ses réformes sur l’autorité de la religion, ainsi que l’ont fait tous les législateurs des peuples primitifs ; la difficulté était grande, sans doute ; cependant, il laisse une porte ouverte à l’interprétation et aux modifications, en disant que « Dieu peut toujours remplacer ce qu’il a donné par quelque chose de mieux. »


24. — Il vous est interdit d’épouser vos mères, vos filles, vos sœurs, vos tantes paternelles et maternelles, vos nièces, vos nourrices, vos sœurs de lait, les mères de vos femmes, les filles confiées à votre tutelle et issues de femmes avec lesquelles vous auriez cohabité. N’épousez pas non plus les filles de vos fils que vous avez engendrés, ni deux sœurs. Il vous est défendu d’épouser des femmes mariées, excepté celles qui seraient tombées entre vos mains comme esclaves. (Sourate iv, v. 27 et suiv.)

Ces prescriptions peuvent donner une idée de la démoralisation de ces peuples ; pour être obligé de défendre de tels abus, il fallait qu’ils existassent.

Epouses du Prophète, restez au sein de vos maisons. Ne vous parez point fastueusement, comme aux jours de l’idolâtrie. Faites la prière et l’aumône. Obéissez à Dieu et à son apôtre. Il veut écarter le vice de vos cœurs. Vous êtes de la famille du Prophète, et vous devez être pures. — Zeid répudia son épouse. Nous t’avons uni avec elle, afin que les fidèles aient la liberté d’épouser les femmes de leurs fils adoptifs, après la répudiation. Le précepte divin doit avoir son exécution. — O prophète, il t’est permis d’épouser les femmes que tu auras dotées, les captives que Dieu a fait tomber dans tes mains, les filles de tes oncles et de tes tantes qui ont pris la fuite avec toi, et toute femme fidèle qui t’accordera son cœur. C’est un privilège que nous t’accordons. — Tu n’ajouteras point au nombre actuel de tes épouses ; tu ne pourras les changer contre d’autres dont la beauté t’aurait frappé. Mais la fréquentation de tes femmes esclaves t’est toujours permise. Dieu observe tout. (Sourate xxxiii, v. 37, 49, 52.)

C’est ici que Mahomet descend véritablement du piédestal sur lequel il était monté. On regrette de le voir tomber si bas après s’être élevé si haut, et faire intervenir Dieu pour justifier les privilèges qu’il s’octroyait pour l’assouvissement de ses passions. Il accordait aux croyants quatre femmes légitimes, alors que lui-même s’en était donné treize. Le législateur doit être le premier sujet des lois qu’il fait. C’est une tache ineffaçable qu’il a jetée sur lui et sur l’Islamisme.


25. — Efforcez-vous de mériter l’indulgence du Seigneur, et la possession du paradis, dont l’étendue égale les cieux et la terre, séjour préparé aux justes, — à ceux qui font l’aumône dans la prospérité et dans l’adversité, et qui, maîtres des mouvements de leur colère, savent pardonner à leurs semblables. Dieu aime la bienfaisance. (Sourate iii, v. 127, 128.)

Dieu a promis aux fidèles qui auront pratiqué la vertu l’entrée des jardins où coulent des fleuves. Ils y demeureront éternellement. Les promesses du Seigneur sont véritables. Quoi de plus infaillible que sa parole ? (Sourate iv, v. 121.)

Ils habiteront éternellement le séjour que Dieu leur a préparé, les jardins de délices arrosés par des fleuves, lieux où règnera la souveraine béatitude. (Sourate ix, v. 90.)

Les jardins et les fontaines seront le partage de ceux qui craignent le Seigneur. Ils entreront avec la paix et la sécurité. — Nous ôterons l’envie de leurs cœurs. Ils reposeront sur des lits, et ils auront les uns pour les autres une bienveillance fraternelle. — La fatigue n’approchera point du séjour des délices. On ne leur en ravira point la possession. (Sourate xv, v. 45 à 48.)

Les jardins d’Eden seront l’habitation des justes. Des bracelets d’or ornés de perles, et des habits de soie formeront leur parure. — Louange à Dieu, s’écrieront-ils ; il a écarté de nous la peine ; il est miséricordieux et compatissant. — Il nous a introduits dans le palais éternel, séjour de sa magnificence. La fatigue ni la douleur n’approchent point de cet asile. (Sourate xxxv, v. 30, 31, 32.)

Les hôtes du paradis boiront à longs traits dans la coupe du bonheur. — Couchés sur des lits de soie, ils reposeront près de leurs épouses, sous des ombrages délicieux. — Ils trouveront tous les fruits. Tous leurs désirs seront comblés. (Sourate xxxvi, v. 55, 56, 57.)

Les vrais serviteurs de Dieu auront une nourriture choisie, — des fruits exquis, et ils seront servis avec honneur. — Les jardins des délices seront leur asile. — Pleins d’une bienveillance mutuelle, ils reposeront sur des sièges. — On leur offrira des coupes remplies d’une eau pure, — limpide et d’un goût délicieux, — qui n’obscurcira point leur raison, et ne les enivrera pas. — Près d’eux seront des vierges aux regards modestes, aux grands yeux noirs et dont le teint aura la couleur des œufs de l’autruche. (Sourate xxxvii, v. 39 à 47.)

On dira aux croyants qui auront professé l’Islamisme : Entrez dans le jardin des délices, vous et vos épouses ; ouvrez vos cœurs à la joie. – On leur présentera à boire dans des coupes d’or. Le cœur trouvera dans ce séjour tout ce qu’il peut désirer, l’œil tout ce qui peut le charmer, et ces plaisirs seront éternels. — Voici le paradis dont vos œuvres vous ont procuré la possession. – Nourrissez-vous des fruits qui y croissent en abondance. (Sourate xliii, v. 69 à 72.)

Tel est ce fameux paradis de Mahomet sur lequel on s’est tant égayé, et que nous ne chercherons assurément pas à justifier. Nous dirons seulement qu’il était en harmonie avec les mœurs de ces peuples, et qu’il devait les flatter bien plus que la perspective d’un état purement spirituel, quelque splendide qu’il fût, parce qu’ils étaient trop matériels pour le comprendre et en apprécier la valeur ; il leur fallait quelque chose de plus substantiel, et on peut dire qu’ils ont été servis à souhait. On remarquera sans doute que les fleuves, les fontaines, les fruits abondants et les ombrages y jouaient un grand rôle, car c’est là ce qui manque surtout aux habitants du désert. Des lits moelleux et des habits de soie, pour des gens habitués à coucher sur la terre et vêtus de grossières couvertures en poil de chameau, devaient aussi avoir un grand attrait. Quelque ridicule que tout cela nous paraisse, songeons au milieu où vivait Mahomet, et ne le blâmons pas trop, puisqu’à l’aide de cet appât, il a su tirer un peuple de la barbarie et en faire une grande nation.

Dans un prochain article nous examinerons comment l’Islamisme pourra se rallier à la grande famille de l’humanité civilisée.  [L’article mentionné n’a pas été trouvé.]



[1] [Mohammed der Prophet, sein Leben und seine Lehre: aus handschriftlichen … - Google Books.]


[2] Dans l’original: “… a leur a…”


Il y a une image de ce article dans le service Google - Recherche de livres (Revue Spirite 1866).


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