Le Chemin Écriture du Spiritisme Chrétien.
Doctrine spirite - 1re partie. ©

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Revue spirite — Année III — Février 1860.

(Langue portugaise)

LES ESPRITS GLOBULES.

1. — Le désir de voir les Esprits est une chose bien naturelle, et nous connaissons peu de personnes qui ne souhaitent jouir de cette faculté ; malheureusement c’est une des plus rares, surtout quand elle est permanente. Les apparitions spontanées sont assez fréquentes, mais elles sont accidentelles, et presque toujours motivées par une circonstance tout individuelle, basée sur les rapports qui ont pu exister entre le voyant et l’Esprit qui lui apparaît ; autre chose est donc de voir fortuitement un Esprit ou d’en voir habituellement, et dans les conditions normales les plus ordinaires ; or, c’est là ce qui constitue, à proprement parler, la faculté des médiums voyants. Elle résulte d’une aptitude spéciale dont la cause est encore inconnue, et qui peut se développer, mais que l’on provoquerait en vain quand la prédisposition naturelle n’existe pas. Il faut donc se tenir en garde contre les illusions qui peuvent naître du désir de la posséder, et qui ont donné lieu à d’étranges systèmes. Autant nous combattons les théories hasardées par lesquelles on attaque les manifestations, surtout quand ces théories accusent l’ignorance des faits, autant nous devons chercher, dans l’intérêt de la vérité, à détruire des idées qui prouvent plus d’enthousiasme que de réflexion, et qui, par cela même, font plus de mal que de bien, en donnant prise au ridicule.

 La théorie des visions et des apparitions est aujourd’hui parfaitement connue ; nous l’avons développée dans plusieurs articles, et notamment dans les numéros de décembre 1858, de février et d’août 1859 et dans notre Livre des Médiums, ou Spiritisme expérimental ; nous ne la répéterons donc pas ici, mais nous rappellerons seulement quelques points de fait, avant d’arriver à l’examen du système des globules.


2. — Les Esprits peuvent se produire à la vue sous différents aspects : le plus fréquent est la forme humaine. Leur apparition a généralement lieu sous une forme vaporeuse et diaphane, quelquefois vague et indécise ; c’est souvent au premier abord une lueur blanchâtre, dont les contours se déterminent peu à peu. D’autres fois les lignes sont plus accentuées, et les moindres traits du visage dessinés avec une précision qui permet d’en donner la description la plus exacte. Un peintre, en ces moments, pourrait assurément en faire le portrait avec autant de facilité qu’il le ferait pour une personne vivante. Les allures et l’aspect sont les mêmes que du vivant de l’Esprit. Pouvant donner toutes les apparences à son périsprit, qui constitue son corps éthéré, il se présente sous celle qui peut le mieux le faire reconnaître ; ainsi, bien que, comme Esprit, il n’ait plus aucune des infirmités corporelles qu’il pouvait avoir comme homme, il se montrera estropié, boiteux ou bossu, s’il le juge à propos pour attester son identité. Quant au costume, il se compose le plus ordinairement d’une draperie qui se termine en longue robe flottante ; c’est du moins l’apparence des Esprits supérieurs qui n’ont rien conservé des choses terrestres ; mais les Esprits vulgaires, ceux que l’on a connus, ont presque toujours le costume qu’ils avaient dans la dernière période de leur vie. Souvent ils ont des attributs caractéristiques de leur rang. Les Esprits supérieurs ont toujours une figure belle, noble et sereine ; les Esprits inférieurs, au contraire, ont une physionomie vulgaire, miroir où se peignent les passions plus ou moins ignobles qui les ont agités ; quelquefois ils portent encore les traces des crimes qu’ils ont commis ou des supplices qu’ils ont endurés. Une chose remarquable, c’est qu’à moins de circonstances particulières, les parties les moins bien dessinées sont généralement les membres inférieurs, tandis que la tête, la poitrine et les bras sont toujours nettement tracés.

 Nous avons dit que l’apparition a quelque chose de vaporeux, malgré sa netteté ; on pourrait, dans certain cas, la comparer à l’image reflétée dans une glace sans étain, qui n’empêche pas de voir les objets qui sont par derrière. C’est assez ordinairement ainsi que les distinguent les médiums voyants ; ils les voient aller, venir, entrer, sortir, circuler parmi la foule des vivants, en ayant l’air, pour les Esprits vulgaires du moins, de prendre une part active à ce qui se passe autour d’eux, de s’y intéresser selon le sujet, d’écouter ce qui se dit. On les voit souvent s’approcher des personnes, leur souffler des idées, les influencer, les consoler, se montrer tristes ou contents du résultat qu’ils obtiennent : c’est, en un mot, la doublure ou le reflet du monde corporel, avec ses passions, ses vices ou ses vertus, plus des vertus que notre nature matérielle nous permet difficilement de comprendre. Tel est ce monde occulte qui peuple les espaces, qui nous entoure, au milieu duquel nous vivons sans nous en douter, comme nous vivons au milieu des myriades du monde microscopique.

 Mais il peut arriver que l’Esprit revête une forme plus nette encore et prenne toutes les apparences d’un corps solide, au point de produire une illusion complète et de faire croire à la présence d’un être corporel. Enfin la tangibilité peut devenir réelle, c’est-à-dire qu’on peut toucher, palper ce corps, sentir la même résistance, la même chaleur que de la part d’un corps animé, à cela près qu’il peut s’évanouir avec la rapidité de l’éclair.

 Outre que l’apparition de ces êtres, désignés sous le nom d’agénères, est fort rare, elle est toujours accidentelle et de courte durée, et ils ne sauraient devenir sous cette forme, les commensaux habituels d’une maison.

 On sait que, parmi les facultés exceptionnelles dont M. Home a donné des preuves irrécusables, il faut placer celle de faire apparaître des mains tangibles que l’on peut palper, et qui, de leur côté, peuvent saisir, étreindre, et laisser des empreintes sur la peau. Les faits d’apparitions tangibles, disons-nous, sont assez rares, mais ceux qui se sont passés dans ces derniers temps confirment et expliquent ceux que l’histoire rapporte au sujet de personnes qui se sont montrées après leur mort avec toutes les apparences de la nature corporelle. Au reste, quelque extraordinaires que soient de pareils phénomènes, tout le surnaturel disparaît quand on en connaît l’explication, et l’on comprend alors que, loin d’être une dérogation aux lois de la nature, ils n’en sont qu’une application.


3. — Quand les Esprits affectent la forme humaine, on ne saurait s’y tromper ; il n’en est pas ainsi quand ils prennent d’autres apparences.

 Nous ne parlerons pas de certaines images terrestres reflétées par l’atmosphère, et qui ont pu alimenter la superstition chez des gens ignorants, mais de quelques autres effets sur lesquels des hommes, même éclairés, ont pu se méprendre ; c’est là surtout qu’il faut se tenir en garde contre l’illusion pour ne pas s’exposer à prendre pour des Esprits des phénomènes purement physiques.

 L’air n’est pas toujours d’une limpidité parfaite, et il est telles circonstances où l’agitation et les courants des molécules aériformes produits par la chaleur sont parfaitement visibles. L’agglomération de ces parcelles forme de petites masses transparentes qui semblent nager dans l’espace, et qui ont donné lieu au singulier système des Esprits sous forme de globules. La cause de cette apparence est donc dans l’air lui-même, mais elle peut être aussi dans l’œil. L’humeur aqueuse offre des points imperceptibles qui ont perdu de leur transparence ; ces points sont comme des corps semi-opaques en suspension dans le liquide dont ils suivent les mouvements et les ondulations. Ils produisent dans l’air ambiant et à distance, par l’effet du grossissement et de la réfraction, l’apparence de petits disques quelquefois irisés, variant de 1 à 10 millimètres de diamètre. Nous avons vu certaines personnes prendre ces disques pour des Esprits familiers qui les suivaient et les accompagnaient partout, et dans leur enthousiasme voir des figures dans les nuances de l’irisation. Une simple observation, fournie par ces personnes mêmes, va les ramener sur le terrain de la réalité. Ces disques ou médaillons, disent-elles, non seulement les accompagnent, mais suivent tous leurs mouvements ; ils vont à droite, à gauche, en haut, en bas, ou s’arrêtent selon le mouvement de la tête ; cette coïncidence prouve à elle seule que le siège de l’apparence est en nous et non hors de nous, et ce qui le démontre en outre, c’est que, dans leurs mouvements ondulatoires, ces disques ne s’écartent jamais d’un certain angle ; mais comme ils ne suivent pas avec brusquerie le mouvement de la ligne visuelle, ils semblent avoir une certaine indépendance. La cause de cet effet est bien simple. Les points opaques on semi-opaques de l’humeur aqueuse, cause première du phénomène, sont, avons-nous dit, comme tenus en suspension, mais ils ont toujours une tendance à descendre ; lorsqu’ils montent, c’est qu’ils y sont sollicités par le mouvement de l’œil de bas en haut ; arrivés à une certaine hauteur, si on fixe l’œil, on voit le disque descendre lentement, puis s’arrêter ; leur mobilité est extrême, parce qu’il suffit d’un mouvement imperceptible de l’œil pour faire parcourir au rayon visuel toute l’amplitude de l’angle à son ouverture, dans l’espace où l’image se projette.

 Nous en dirons autant des étincelles qui se produisent quelquefois en gerbes ou en faisceaux plus ou moins compactes, par la contraction des muscles de l’œil, et qui sont dues probablement à la phosphorescence ou à l’électricité naturelle de l’iris, puisqu’elles sont généralement circonscrites dans la circonférence du disque de cet organe.

 De pareilles illusions ne peuvent provenir que d’une observation incomplète ; quiconque aura sérieusement étudié la nature des Esprits par tous les moyens que donne la science pratique, comprendra tout ce qu’elles ont de puéril. Si ces globules aériens étaient des Esprits, il faudrait convenir qu’ils seraient astreints à un rôle bien mécanique pour des êtres intelligents et libres ; rôle passablement fastidieux pour des Esprits inférieurs, à plus forte raison incompatible avec l’idée que nous nous faisons des Esprits supérieurs.

 Les seuls signes qui puissent véritablement attester la présence des Esprits sont les signes intelligents. Tant qu’il ne sera pas prouvé que les images dont nous venons de parler, eussent-elles même la forme humaine, ont un mouvement propre, spontané, ayant un caractère intentionnel évident et accusant une volonté libre, nous n’y verrons que de simples phénomènes physiologiques ou d’optique. La même observation s’applique à tous les genres de manifestations, et surtout aux bruits, aux coups frappés, aux mouvements insolites des corps inertes que mille causes physiques peuvent produire. Nous le répétons, tant qu’un effet n’est pas intelligent par lui-même, et indépendant de l’intelligence des hommes, il faut y regarder à deux fois avant de l’attribuer aux Esprits.


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