Par une belle soirée de printemps, un homme riche et généreux était assis dans son salon ; il humait avec bonheur le parfum des fleurs de son jardin. Il énumérait avec complaisance toutes les bonnes œuvres qu’il avait faites pendant l’année. A ce souvenir, il ne put s’empêcher de jeter un regard presque méprisant sur la maison d’un de ses voisins, lequel n’avait pu donner qu’une modique pièce de monnaie pour la construction de l’église paroissiale. Pour ma part, dit-il, j’ai donné plus de mille écus pour cette œuvre pie ; j’ai jeté négligemment un billet de 500 francs dans la bourse que me tendait cette jeune duchesse en faveur des pauvres ; j’ai donné beaucoup pour les fêtes de bienfaisance, pour toute espèce de loterie, et je crois que Dieu me saura gré de tant de bien que j’ai fait. Ah ! j’oubliais une légère aumône que j’ai faite dernièrement à une malheureuse veuve chargée d’une nombreuse famille, et qui élève encore un orphelin ; mais ce que je lui ai donné est si peu de chose, que ce n’est certainement pas cela qui m’ouvrira le ciel.
Tu te trompes, lui répondit tout à coup une voix qui lui fit tourner la tête : c’est la seule que Dieu accepte, en voilà la preuve. A l’instant une main effaça le papier qu’il avait noirci de toutes ses bonnes œuvres, et ne laissant que la dernière inscrite, elle l’emporta dans le ciel.
Ce n’est donc pas l’aumône faite avec ostentation qui est la meilleure, mais celle qui est faite dans toute l’humilité du cœur.
Joinville, Amy de Loys.